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Rapport de la commission d'examen

4.0 Répercussions sur la santé

La santé, on le sait bien, n'est pas seulement l'absence de maladie : c'est un état de bien-être physique, mental et affectif. Le mandat de la commission en tient compte, car il comprend l'examen des effets socio-économiques et des questions relatives à l'environnement et à la santé. Notre analyse de l'effet possible des projets d'exploitation des mines d'uranium sur la santé des travailleurs et des collectivités porte donc sur trois types d'effets possibles, à savoir les effets physiques directs, les effets socio-économiques et les effets psychologiques.

4.1 Santé des travailleurs

Pendant la période de six ans que couvrent les études sur l'exploitation de gisements d'uranium, des mesures ont été prises pour améliorer l'état de santé des mineurs et pour assurer leur sécurité. Entre autres mesures, indiquons la modification de l'Occupational Health and Safety Act de la Saskatchewan, ainsi que l'examen des Occupational Health and Safety Regulations qui se rattachent à cette loi et l'examen proposé des Mines Regulations , qui s'y rattachent également; la modification du Code canadien du travail (1996) et la mise en œuvre du Projet concernant l'efficacité de la fédération (1994). Par suite des recommandations de la commission, la province a modifié l'Occupational Health and Safety Appendix, qui porte sur les baux de surface des mines d'uranium, pour tenir compte des normes CIPR-60 et CIPR-65 de la Commission internationale de protection radiologique.

D'après les observations qui ont été présentées à la commission, il semble que la radioexposition des travailleurs des mines d'uranium en Saskatchewan est maintenue en deçà des doses limites. Collaborant avec les organes de réglementation, les exploitants de mines prévoient être en mesure de respecter les nouvelles limites d'exposition avec autant de succès. La commission applaudit à l'initiative qu'a prise récemment la province en décidant d'adopter les nouvelles normes internationales de protection contre les radiations, applicables aux travailleurs des mines d'uranium. Par contre, le temps que mettent les gouvernements fédéral et provincial à modifier les normes de sécurité applicables aux travailleurs des mines n'est pas sans nous préoccuper. Nous nous demandons si le processus de modification des dispositions réglementaires se poursuivra lorsque les examens publics seront terminés? Le fait que la province modifie les normes de protection contre les radiations au moyen de baux de surface nous préoccupe également, car ces baux n'ont pas le caractère permanent des règlements. Ces normes s'appliqueront-elles non seulement aux mines d'uranium, mais aussi aux autres milieux où les travailleurs pourraient être exposés à des radiations?

De façon analogue, les dossiers sur les questions habituelles de sécurité minière sont généralement positifs : ils indiquent que les exploitants des mines et les organes de réglementation ont pu offrir aux travailleurs une protection adéquate dans les mines d'uranium de la Saskatchewan. Cependant, aucune résolution ne précise à quelle sphère de compétence incombe la responsabilité en matière de santé et de sécurité au travail. Le gouvernement provincial surveille de près la sécurité des travailleurs en Saskatchewan, mais les autorités fédérales conservent le droit d'engager des poursuites pour garantir le respect des lois.

La commission presse les gouvernements de modifier sans tarder leurs lois en fonction des nouvelles normes internationales de protection contre les radiations, d'accélérer la mise à jour des Mines Regulations et de régler le conflit de compétence au sujet de la responsabilité administrative des questions habituelles de santé et de sécurité dans les mines d'uranium.

4.2 Études épidémiologiques

On peut évaluer les effets d'une certaine industrie sur la santé et la sécurité en comparant au niveau statistique les événements liés à la santé des travailleurs et les événements qui touchent la santé de la population en général. Dans le passé, des études épidémiologiques ont souvent été menées pour évaluer les risques professionnels et pour trouver des moyens d'améliorer la sécurité en milieu de travail.

Les travailleurs des mines d'uranium de la Saskatchewan sont exposés au produit de filiation du radon, de même qu'à un certain nombre de métaux lourds tels l'arsenic et le nickel, qu'on sait cancérogènes. Il se peut donc qu'un effet de synergie s'exerce sur les taux de cancers pulmonaires causés par de nombreuses expositions. Pour cette raison, nous avons recommandé, dans un rapport publié en 1993, qu'on prenne les dispositions nécessaires pour réaliser une étude épidémiologique permanente auprès de l'ensemble des mineurs de la Saskatchewan (anciens, actuels et futurs). [D.G. Lee, J.F. Archibald, J. Dantouze, R. Neal and A. Yassi, Dominique-Janine Extension, McClean Lake Project et Midwest Joint Venture, Approvisionnements et Services Canada, octobre 1993, p. 20. ]

Pour donner suite à cette recommandation, la Commission de contrôle de l'énergie atomique (CCEA) a mis sur pied, avec la collaboration des sociétés minières et de la province, une équipe multidisciplinaire chargée d'élaborer un projet d'étude et d'effectuer l'étude. [D. Baris, A Cohort Mortality Study of Saskatchewan Uranium Miners, Commission de contrôle de l'énergie atomique, Submission to Midwest Public Hearings, Saskatoon, Saskatchewan, 28 mai 1996.] Composée d'épidémiologistes, de statisticiens, d'hygiénistes industriels et de cliniciens qui proviennent des organismes participants, cette équipe propose de réaliser l'étude auprès d'environ 5 000 travailleurs de mines d'uranium en Saskatchewan, employés entre 1975 et 2010 dans les mines des lacs Cluff, Key, Rabbit et McClean, de la rivière McArthur ainsi que dans d'autres mines dont l'exploitation sera approuvée par la suite.

Le projet se déroulera en deux étapes. D'abord, l'équipe du projet comparera les taux de mortalité des mineurs au taux de mortalité d'une population-type en Saskatchewan. Ensuite, une fois que les données recueillies précédemment auront fait l'objet d'une analyse statistique convenable, l'équipe entreprendra une étude de cohorte pour examiner plus à fond le nombre de cancers pulmonaires et toutes autres causes de décès auxquelles on croit que des risques excédentaires sont associés.

Cette étude épidémiologique permettra de dégager des données concrètes qui serviront à évaluer les effets des mines d'uranium sur la santé des travailleurs. Elle permettra également de déterminer si les mesures de protection existantes sont suffisantes ou si des améliorations doivent être apportées dans certains secteurs. Sans ces renseignements, il ne saurait être question de prendre des décisions éclairées à l'égard de l'augmentation possible des niveaux de protection.

Cette étude, qui résulte du processus d'examen, peut avoir de l'importance pour la protection des mineurs. Nous devons donc féliciter les personnes qui en sont à l'origine et recommander le maintien de l'aide financière nécessaire pour mener à bien cette étude.

4.3 Vitalité de la collectivité et santé communautaires

La vitalité de la collectivité se définit comme le bien-être social et la qualité de vie des membres de la collectivité. Elle est aussi intimement liée à la santé de la collectivité, car on sait que des facteurs comme l'emploi, le revenu, l'éducation, le logement, l'environnement et les modes de vie personnels ont une influence sur l'état de santé.

L'industrie minière de l'uranium continuera d'exercer une influence non négligeable sur la vitalité de la collectivité et la santé communautaires dans le nord de la Saskatchewan parce qu'elle représente une importante source d'emplois et parce qu'elle contribue à l'aménagement de voies de transport routier et aérien, ainsi qu'au développement du réseau électrique dans cette région. Ses activités risquent malheureusement de contaminer de grandes étendues de territoire et de vicier l'air, l'eau et les aliments provenant de la région, dont dépendent de nombreux habitants. De plus, il y a les sentiments collectif d'injustice et de colère que suscite l'extraction, sur les territoires ancestraux, de ressources valant des milliards de dollars, quand de nombreux habitants luttent pour satisfaire leurs besoins de base. Le sentiment collectif d'injustice est ce qui pousse en partie les collectivités nordiques à vouloir une certaine forme de partage des revenus.

Il est clair que l'extraction de l'uranium peut avoir des effets positifs et des effets négatifs sur les collectivités nordiques. Il est nécessaire d'établir une série d'indicateurs pouvant servir à l'évaluation plus exacte des répercussions de l'extraction minière sur la qualité de vie des habitants du Nord. Nous devons des éloges à Cameco Corporation qui a décidé d'offrir chaque année un montant de 250 000 dollars couvrant les services d'un spécialiste des sciences sociales dans le Nord et la création d'une base de données concernant les effets des activités minières sur la situation socio-économique et sur la santé des collectivités du Nord. Nous nous réjouissons également de constater que la province s'est engagée à faciliter les discussions entre les représentants du secteur de l'exploitation de l'uranium, les comités de la qualité de l'environnement et les nouveaux conseils de la santé du Nord, afin qu'ils puissent déterminer clairement les principaux indices qui composeront les bases de données et d'autres secteurs de surveillance. [The Government's Position on Proposed Uranium Mining Developments in Northern Saskatchewan, McArthur River Project, gouvernement de la Saskatchewan, mai 1997, p. 22.]

La commission constate que l'industrie en général prend des mesures pour vraiment connaître l'opinion des habitants du Nord sur les questions qui touchent la vitalité de la collectivité. L'industrie communique avec les représentants des six collectivités d'Athabasca par l'entremise du Groupe de travail de l'Athabasca et tente ainsi d'établir, entre les gens de la région et les sociétés minières, un consensus à l'égard du déroulement des activités minières dans le Nord. Les sociétés minières se sont engagées à maintenir, en principe et en espèces, l'appui qu'elles offrent aux trois comités de la qualité de l'environnement; elles continueront donc d'offrir des services de transport, d'hébergement et d'information aux fins des visites sur les chantiers miniers et continueront de prêter une oreille attentive aux préoccupations des comités. [Par exemple, J. Tosney, président, Cigar Lake Mining Corporation, Transcript of Supplementary Public Hearings for Midwest and Cigar Lake, La Ronge, Saskatchewan, 27 août 1997. p. 142. ]

De nombreux indices montrent que l'industrie tient compte des préoccupations des habitants du Nord. La proportion de ces habitants qui font partie de la population active ne cesse d'augmenter; les modalités d'appel d'offres sont maintenant telles que les entreprises du Nord ont beaucoup plus de possibilités qu'avant; des mesures d'encouragement visent à inciter les jeunes à poursuivre leurs études pour améliorer leurs qualifications; une aide financière et opérationnelle est offerte pour la mise en œuvre de programmes de formation préalable à l'emploi dans le cadre du Plan de formation multilatéral; enfin, des possibilités d'éducation et de formation sont offertes aux employés. Cette liste est loin d'être complète, mais elle montre que les sociétés d'exploitation minières d'uranium font des efforts pour assumer leurs responsabilités sociales dans le Nord.

Il est encourageant de constater que les gouvernements fédéral et provincial ont entrepris récemment des projets visant à surveiller différents aspects de la santé communautaire, y compris les impacts cumulatifs et la contamination possible des aliments provenant de la région; indiquons à cet effet la réalisation d'une enquête de base sur l'état de santé des collectivités et la réalisation d'une étude sur la santé des travailleurs des mines d'uranium. Ces initiatives devraient enrichir le processus général de planification de la santé dans le nord de la Saskatchewan. Les gouvernements fédéral et provincial ont contribué au financement du Plan de formation multilatéral et ont dernièrement entamé avec les dirigeants du Nord des pourparlers sur les questions de délestage, de taxation, d'autonomie gouvernementale, de financement et de partage des revenus. Cette dernière initiative prendra probablement beaucoup de temps, mais elle pourrait modifier en profondeur la façon dont bon nombre d'habitants du Nord perçoivent l'exploitation des gîtes d'uranium, surtout si les pourparlers aboutissent à un plus grand partage des retombées.

Il est nécessaire de clore plus sobrement notre exposé sur la vitalité communautaire. Les habitants du Nord nourrissent des attentes extrêmement élevées à l'égard de l'industrie minière de l'uranium. Beaucoup d'entre eux y voient la planche de salut économique de leur région. Il reste que le taux de croissance de la population du Nord est considérablement élevé, d'où la difficulté d'assurer des niveaux d'emploi suffisants aux diplômés toujours plus nombreux. Il ne sera pas possible, ni souhaitable, que l'industrie minière de l'uranium règle tous les problèmes économiques du Nord. Il est nécessaire de diversifier la base économique du Nord pour réduire la dépendance de la population à l'égard d'une seule industrie.