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Rapport de la commission d'examen

Commission conjointe fédérale-provinciale des projets d'exploitation de mines d'uranium dans le nord de la Saskatchewan
(Synthèse des observations)

Novembre 1997

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Sommaire

En août 1991, le gouvernement du Canada et celui de la Saskatchewan ont nommé une commission conjointe fédérale-provinciale d'évaluation environnementale chargée d'examiner un certain nombre de projets d'exploitation de mines d'uranium dans le nord de la Saskatchewan. Dans le cadre de son mandat, la commission conjointe était notamment tenue d'examiner les effets cumulatifs des activités minières actuelles et des projets proposés. Le présent rapport répond à cette exigence. Les conclusions principales de l'examen, résumées au chapitre 7 des présentes, sont fondées sur les connaissances que la commission a accumulée au sujet de l'industrie de l'uranium dans son entier; ces conclusions se veulent distinctes de celles contenues dans les rapports séparés portant sur chacun des projets examinés par la commission.

Étant donné que les habitants du nord de la Saskatchewan sont ceux qui subiront les effets les plus percutants de ces projets, nous nous sommes penchés avec une vigilance toute spéciale sur leurs préoccupations. Après avoir écouté les exposés avec attention, lu une somme de documents et tenu des débats approfondis, nous en sommes venus à la conclusion que la meilleure recommandation à faire est de permettre l'exploitation des mines, mais à des conditions propres à limiter les dommages environnementaux et à accroître les bienfaits des projets pour le Nord. Dans les autres rapports, nous avons essayé de poursuivre cet objectif en formulant des recommandations visant chaque projet en particulier; dans le présent rapport, nous voulons analyser certaines questions d'ordre général qui influeraient sur les avantages éventuels à tirer de ces projets.

  1. La formation, un élément primordial. Si l'on met fin à des initiatives telles que le Multi-Party Training Plan , la population du Nord sera incapable de tirer profit des débouchés offerts par l'industrie des mines d'uranium.
  2. Les possibilités d'emploi et les occasions d'affaires doivent être ouvertes aux citoyens du Nord. La façon la plus efficace d'y arriver est d'intégrer des objectifs satisfaisants dans les accords sur les ressources humaines qui sont liés aux baux relatifs aux droits de surface.
  3. Il est tout aussi important de protéger les collectivités du Nord et leurs habitants que de protéger la biote. Il faudrait embaucher des spécialistes qualifiés pour contrôler et étudier les impacts des mines d'uranium sur la qualité de vie des collectivités du Nord, et prévoir l'atténuation de tout effet nuisible.
  4. La recherche scientifique peut proposer des méthodes propres à rehausser la rentabilité de l'exploitation minière tout en renforçant la protection de l'environnement. Les gouvernements, en collaboration avec l'industrie, devraient encourager ce genre de recherches au Conseil de recherches de la Saskatchewan et dans les universités.
  5. En centralisant à un seul endroit la concentration du minerai provenant de plusieurs mines, on causera au total moins de dommages à l'environnement qu'en situant ces activités dans diverses usines près des mines. Il convient donc d'encourager la concentration collective du minerai tiré de plusieurs mines.
  6. Les installations de stockage des résidus dans des puits de mines épuisées offrent une meilleure protection environnementale que les dépôts en surface. Nous recommandons donc qu'à l'avenir, tous les résidus soient déposés dans des puits de mines épuisées.
  7. Tous les déchets rocheux susceptibles de produire des acides devraient être mis à l'abri d'une exposition à l'oxygène. On peut y arriver en utilisant ces déchets pour remplir des mines souterraines désaffectées ou en les déposant dans des puits de mines épuisées. Le stockage sous l'eau des lacs naturels ne devrait être envisagé que s'il n'y a aucun puits de mine épuisée pouvant servir à cette fin.
  8. Il faudra instaurer une surveillance perpétuelle des installations désaffectées de stockage des résidus, ainsi que des déchets rocheux susceptibles de produire des acides. Un fonds financièrement indépendant devrait être créé afin de couvrir les coûts de la surveillance et de toute mesure d'atténuation qui pourrait s'avérer nécessaire.
  9. Il faudra contrôler les effets cumulatifs à l'échelle de la région afin d'évaluer la propagation éventuelle des contaminants provenant de ces mines. Il est important de prévoir des fonds suffisants, aussi longtemps que nécessaire, pour le financement du Groupe de travail sur le contrôle des effets cumulatifs (GTCEC).
  10. Les comités de la qualité environnementale offrent aux gens du Nord des mécanismes de participation au développement du secteur minier. La meilleure façon de protéger l'environnement du nord est de faire mieux comprendre ce secteur à la population et en amenant les citoyens à prendre part au développement futur de l'exploitation minière. Les gouvernements et l'industrie devraient continuer de soutenir les comités de la qualité environnementale.
  11. La province devrait réaliser une étude exhaustive des effets cumulatifs de l'utilisation intensive qui sera imposée aux routes du nord si le projet est approuvé, et se préparer à les maintenir dans un état conforme à des normes acceptables, en collaboration avec les utilisateurs.
  12. Les mineurs, surtout ceux qui travaillent sous terre, dépendent des organismes de réglementation pour qu'on leur assure des conditions de travail sécuritaire. Il est donc essentiel que les lois et les règlements prévoient une protection suffisante pour tous les travailleurs, contractuels et autres; que les mines soient inspectées fréquemment et que toutes les précautions soient prises pour veiller à l'observation de pratiques de travail axées sur la sécurité.

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1.0 Introduction

Depuis sa création en 1991, la commission a procédé à l'examen public de sept études d'impact environnemental (le projet d'exploration souterraine McArthur River, l'extension Dominique-Janine, le Midwest Joint Venture et les projets McClean Lake, McArthur River, Cigar Lake et Midwest). Les examens ont ainsi porté sur l'exploitation de neuf gisements de minerai isolés, la construction d'une usine de concentration, la conception de deux installations de stockage des résidus et l'expansion d'un système de transport. Dans le cours de nos travaux, nous avons lu 42 586 pages de documents fournis par les promoteurs, reçu et lu 587 exposés écrits, écouté 764 exposés oraux en prenant des notes sur leur contenu, produit 10 485 pages de transcriptions, délégué l'élaboration de neuf rapports techniques, émis neuf demandes de renseignements supplémentaires et rédigé six rapports, dont celui-ci. Pendant les examens, nous avons tenu 84 jours d'audiences publiques et participé à 39 réunions de commission, ainsi qu'à une quantité encore indéfinie de conférences téléphoniques. Au total, la commission a passé 62 jours dans le nord de la Saskatchewan, c'est-à-dire, du moins selon nous, plus de temps que toute autre commission de ce genre.

Durant cette période de travail en Saskatchewan, tout le monde, y compris les membres des collectivités, les représentants des divers groupes de détenteurs d'intérêt, les promoteurs, les responsables de la réglementation dans le secteur et les représentants officiels des administrations locales et tribales et des gouvernements provincial et fédéral, nous a accueillis avec hospitalité et traités avec respect. Nous nous sommes entretenus avec une foule de personnes, chacune ayant son point de vue personnel concernant le secteur de l'exploitation des mines d'uranium. Notre travail s'est révélé à la fois édifiant et ardu, et nous sommes profondément reconnaissants à tous ceux et celles qui nous aidés à comprendre à fond ces projets et leurs impacts possibles sur l'environnement et les populations du nord de la Saskatchewan. Nous tenons à remercier tout spécialement deux anciens membres de la commission, Annalee Yassi et John Dantouze, qui ont apporté une contribution remarquable aux examens avant de remettre leur démission, et notre personnel de secrétariat, Bob Greyell, Guy Riverin, Henry Epp, Heather Humphries, Don Hovdebo et Jackie Kelly, sans l'aide desquels notre mission aurait été impossible.

La réalisation de ces activités d'examen nous a permis de mieux apprécier et de mieux comprendre le secteur soumis à l'examen et d'acquérir un respect encore plus poussé devant les dommages environnementaux qui pourraient sévir dans le nord de la Saskatchewan si les projets à l'étude ne sont pas mis en oeuvre de façon convenable. Pour répondre à la partie de notre mandat selon laquelle nous étions tenus d'examiner les effets cumulatifs des projets, nous avons inclus le présent résumé sur les effets combinés de toutes les mines, usines de concentration et routes en question. Les recommandations et les conclusions contenues dans les présentes sont fondées sur nos connaissances accumulées au sujet du secteur minier dans son entier, et non pas au sujet de chacun des projets, qui ont fait l'objet de rapports distincts. Les réactions des gouvernements de la Saskatchewan et du Canada à ces recommandations pourraient donc être formulées séparément de leurs réactions aux recommandations relatives aux projets Midwest et Cigar Lake, deux propositions présentées en même temps.

Les commentaires qui suivent figurent sous des rubriques tirées de notre mandat, c'est-à-dire : questions environnementales, questions de sécurité, conséquences pour la santé et effets socio-économiques.

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2.0 Questions environnementales

Les examens ont principalement porté sur l'environnement du nord de la Saskatchewan et sur sa préservation pour les générations futures.

Les mines sont situées dans une région du Canada encore largement inexploitée et non touchée par les impacts négatifs que le développement industriel suscite souvent dans un secteur géographique. Un tel environnement est souvent plus vulnérable et plus précieux que d'autres, qui ont déjà subi les contrecoups de l'exploitation industrielle. La préservation d'un environnement vierge est toujours préférable à la remise en état d'un milieu qu'on a laissé se détériorer.

Dès le début, l'importance de l'environnement pour les habitants du nord de la Saskatchewan a été clairement portée à notre attention dans le mémoire de Maureen Ahenakew :

La terre nous nourrit. Notre survie, notre vie dépend de la pureté et de la propreté de la terre. Dans mon esprit, cela est très clair, il n'y a pas de confusion possible; à mes yeux, on ne peut le dire plus directement qu'en affirmant que nous risquons la vie de tous en autorisant n'importe quel projet minier ou n'importe quelle forme de destruction de la terre. L'exploitation d'une mine d'uranium, c'est cela pour moi -- la destruction de la terre. En général, on en vient à penser que la destruction de la terre signifie des retombées économiques immédiates. Les retombées économiques ne nous apporteront rien de bon. L'argent ne nous apportera rien de bon si la vie disparaît. Il n'aura aucune valeur. Nous avons tous besoin d'eau et de nourriture, nous avons tous besoin de manger et de boire. Nous avons tous besoin d'air pour survivre -- chacun d'entre nous. Peu importe la couleur de notre peau ou l'endroit où nous vivons sur la planète, nous avons besoin de toutes ces choses pour survivre. Si la terre est empoisonnée, nous sommes empoisonnés. Nous le savons maintenant. [M. Ahenakew, Transcript of Public Hearings on the McArthur River Underground Exploration Program, Saskatoon, Saskatchewan, les 4 et 5 décembre 1992, p. 71.]

D'autres personnes, par exemple John James Mercredi, étaient moins convaincues des impacts négatifs de l'exploitation minière sur l'environnement du Nord :

Ce dont il est question ici, c'est de l'activité minière dans le nord de la Saskatchewan. Et certaines personnes ont affirmé que les mines détruisent l'environnement. J'aimerais voir certaines preuves de ce que ces personnes avancent parce que, comme je l'ai dit, j'ai moi-même travaillé dans les mines. Et pour ce qui touche la détérioration du territoire, de l'environnement et de l'habitat de la faune, j'aimerais qu'on me donne des preuves concrètes. J'ai besoin d'en savoir plus à ce sujet. J'ai besoin d'entendre les arguments des gens qui sont ici également. Vous pourriez dire que je vous mets en quelque sorte au défi de me montrer les changements à l'environnement qui d'après vous ont été causés par l'activité minière. Vous savez, je dois entendre ces choses des gens qui les ont vues. [J.J. Mercredi, Transcript of Puclic Hearings on the McClean Lake Project, Midwest Joint Venture Ltd., and Dominique-Janine Extension at Cluff Lake, Black Lake, Saskatchewan, le 13 avril 1993, pp. 103 - 104.]

D'autres encore appuyaient les projets miniers dans la mesure où ils seraient réalisés en collaboration avec les habitants du Nord et que ces derniers auraient la garantie qu'ils bénéficieraient de la majorité des emplois créés. Face aux promoteurs un soir à Black Lake, l'Aîné Louis Chicken a tenu les propos suivants :

Lorsque je parle de mon peuple aujourd'hui, je dois dire que nous sommes très pauvres. Je le sais. Et ce que je demande, ce sont des possibilités d'emploi pour les générations futures. Et quand nous parlons de ce genre de choses, j'ai toujours fait cette demande, et je crois bien que je la ferai toujours. Vous dites que vous créez des possibilités pour nous aujourd'hui. Bien, mais nous avons besoin de garanties. Parce que dans le passé, je ne pense pas que nous ayons eu des occasions comme celle-ci, où on nous donne des options. Et en ce moment, je pense que la direction que prennent les choses, avec les possibilités d'emplois que vous parlez de créer, est la bonne direction.

Parce qu'au moins aurons-nous la chance, comme on peut dire, d'améliorer nos conditions de vie, si nous pouvons avoir notre part des emplois que vous parlez de créer. Je crois que le fait de s'aider mutuellement et de se parler face à face est la bonne façon de procéder. Comme je l'ai déjà dit, je ne parle pas en mon propre nom. Je parle au nom des nombreux jeunes qui nous observent ici aujourd'hui. Lorsque les Aînés parlent, ils essaient de fournir la meilleure information possible aux gens qui les entourent.

Et comme j'ai toujours fait par le passé en tant que représentant de mon peuple, j'essaie d'aborder ces questions de front. J'essaie de discuter face à face avec les gens pour résoudre les problèmes. Et si vous pouviez conclure une entente qui ferait en sorte que les emplois promis soient garantis, nous serions dans la bonne voie. Merci. [Sénateur L. Chicken, Transcript of Public Hearings on the McClean Lake Project, Midwest Joint Venture Ltd., Dominique-Janine Extension at Cluff Lake, Black Lake, Saskatchewan, le 13 avril 1993, p. 145.]

Après avoir écouté attentivement, lu une foule de documents et débattu des questions en profondeur, nous avons conclu que la meilleure voie à suivre était de recommander l'approbation du projet minier à condition qu'on réduise au plus bas niveau possible les dommages pour l'environnement et qu'on prévoit un maximum d'avantages pour les habitants du Nord.

Nous savons que l'environnement peut se rétablir de la plupart des impacts immédiats de l'activité minière. Avec le temps, les secteurs perturbés par l'aménagement de mines et la construction de routes se régénèrent et redeviennent habitables pour les oiseaux, les animaux et les humains. Avec le temps, les lacs et les cours d'eau se débarrassent des contaminants qui proviennent des effluents des mines, pourvu que les limites réglementaires aient été observées. Avec le temps, les polluants atmosphériques se dispersent jusqu'à ce que leurs effets deviennent négligeables, comparativement aux niveaux naturels. Selon nous, ces impacts environnementaux peuvent être tolérés étant donné l'importance d'offrir aux habitants du Nord des possibilités de développement économique.

Il reste cependant des impacts à long terme qui sont associés à l'élimination des résidus et des déchets miniers que la nature pourrait être incapable d'absorber.

Nous sommes très préoccupés par le potentiel polluant à long terme du drainage minier acide. À ce que nous sachions, il n'y a pas de processus naturel qui permettrait d'atténuer cet impact dans le nord de la Saskatchewan. Si rien n'est fait à cet égard, le drainage minier acide pourrait détruire l'habitat et avoir un impact environnemental négatif indélébile.

Les installations de gestion des résidus miniers présentent des risques à long terme encore plus importants pour ce qui est de la contamination des eaux souterraines. Si les fosses d'élimination actuellement envisagées ne donnent pas les résultats escomptés et si nous ne prévoyons pas de mesures d'atténuation, nous pourrions nous retrouver avec un grave problème de pollution.

Ce sont ces deux menaces à long terme pour l'environnement, de même que les mesures de surveillance dont elles doivent faire l'objet, qui seront examinées dans le reste du présent chapitre. Il est essentiel que les générations futures ne se retrouvent pas aux prises avec des problèmes qui nécessiteront des interventions plus coûteuses que la valeur des avantages prévus dans le moment présent.

2.1 Élimination des stériles

Il est habituellement nécessaire d'enlever de larges volumes de morts-terrains pour avoir accès à un gisement de minerai. Ces morts-terrains, que les mineurs appellent les déchets rocheux ou les stériles, sont considérés comme étant propres s'ils ne contiennent pas de métaux lourds ou de minéraux solubles qui peuvent s'oxyder sous l'action de l'oxygène atmosphérique. Une partie de ces morts-terrains peut servir à la fabrication de granulat utilisé en construction, ce qui confère une certaine valeur aux résidus miniers. Malheureusement, on ne peut disposer de tous les résidus miniers propres d'une manière aussi avantageuse; une portion doit être déposée de façon permanente à la surface du sol. Ces amas de stériles, s'ils sont bien délimités et recouverts de végétation, modifient certes le paysage, mais causent peu de dommages à l'environnement, voire aucun. On trouve un bon exemple d'aménagement réussi des amas de stériles au site minier du lac Cluff, où on a eu recours à l'ensemencement hydraulique pour accélérer le reverdissement.

Les précipitations lessivent les contaminants facilement solubles des amas de stériles qui renferment du minerai à très basse teneur (parfois appelé résidus spéciaux). Dans les mines d'uranium de la Saskatchewan, les principaux contaminants sont les radionucléides provenant de l'uranium et les métaux lourds (notamment l'arsenic et le nickel et, dans une moindre mesure, le cuivre, le zinc, le cadmium, le molybdène et le fer). Si les stériles contiennent également des minéraux sulfurés, leur exposition à l'oxygène et à l'eau provoque la formation d'acides qui accélèrent la libération des métaux lourds et des radionucléides des amas de stériles. [L.M. Broughton, R.W. Chambers et A.MacG. Robertson, Mine Rock Guidelines, Design and Control of Drainage Water Quality, Saskatchewan Environment and Public Safety, avril 1992, chapitre 3.] Le drainage minier acide a pour effet de polluer le bassin hydrographique entourant immédiatement le site des amas de stériles et les cours d'eau en concentrations décroissantes vers l'aval. C'est pourquoi les résidus qui renferment des minéraux ne peuvent être déposés en surface à l'air libre; il faut plutôt en disposer de manière à éliminer ou à réduire considérablement leur exposition à l'oxygène atmosphérique. Des études ont montré que les deux meilleures façons d'empêcher l'oxydation sont, soit d'enfouir les résidus dans un sol adéquat, soit de les submerger dans l'eau. [Ibidem, chapitre 6.]

La recherche effectuée en vue de comprendre comment se libèrent les contaminants des stériles et de déterminer les mesures à prendre pour atténuer le problème a passablement progressé. Les propriétaires des mines d'uranium de la Saskatchewan ont contribué au Programme de neutralisation des eaux de drainage dans l'environnement minier (NEDEM) en parrainant des ateliers sur la mise au point de techniques de submersion des résidus. Cette participation à la recherche de solutions novatrices au problème de l'élimination des stériles fait état de l'intérêt marqué manifesté par les divers promoteurs à cet égard. Il faut également souligner les efforts qu'ils ont déployés afin de remettre les plus grandes quantités possibles de stériles soit sous terre, soit dans des fouilles ouvertes.

Les méthodes proposées pour le traitement des stériles aux projets Midwest et Cigar Lake fournissent des exemples des difficultés majeures auxquelles on peut être confronté. Dans le cas du projet Midwest, Cogema Resources Inc. a proposé qu'une quantité de stériles inertes, environ 110 000 tonnes, soit abandonnée sur un site adjacent à la mine souterraine, sur la rive ouest du bras Mink. [The Midwest Project Environmental Impact Statement, Main Document, Cogema Resources Inc., août 1995, pp. 2-47.] L'amas de stériles formerait un nouvel élément topographique le long du bras Mink, qui pourrait modifier le tracé du réseau hydrographique. Un tel impact serait acceptable si ce n'était de la possibilité que la séparation imparfaite des résidus propres et des déchets spéciaux ne donne lieu à un drainage acide minier dans le bras Mink. En général, on doute de la capacité des promoteurs de séparer adéquatement les résidus propres des déchets rocheux potentiellement acidifiants.

La classification des résidus comme étant propres ou spéciaux dépend des résultats des travaux de forage initiaux et des tests de laboratoire effectués par la suite sur les échantillons ainsi prélevés. [The McArthur River Project Environmental Impact Statement, Addendum, Cameco Corporation, juin 1996, p. 2.1.13.] Bien que les entreprises minières disent avoir confiance en ce processus, le fait qu'il n'y ait aucun moyen d'évaluer le potentiel acidifiant des stériles transportés dans chaque camion qui quitte la mine continue de préoccuper un certain nombre de citoyens. À notre avis, il est nécessaire de disposer de méthodes plus précises qui permettront de faire la distinction entre les deux types de résidus à mesure que l'excavation se poursuivra. La recherche visant à mettre au point de telles méthodes pourrait se révéler un bon investissement.

Au lac Cigar, les promoteurs ont été confrontés à un problème différent. À ce site, seulement une très faible proportion des stérile est propre; il faut donc trouver un moyen de se débarrasser de manière sûre des 2,6 millions de tonnes (1,35 million de mètres cubes) [The Cigar Lake Project Environmental Impact Statement, Main Document, Cigar Lake Mining Corporation, juillet 1995, p. 3-99 et tableau 3.6.31.] de roche potentiellement acidifiante. Pour ce faire, le promoteur a proposé de stocker les résidus sous l'eau, d'abord au lac Bizarre, puis au lac 497 lorsqu'on a découvert que le lac Bizarre constituait un habitat important pour le poisson. Or, un représentant du ministère des Pêches et des Océans a fait la mise en garde suivante concernant cette proposition : Le fait d'approuver le dépôt de stériles potentiellement acidifiants dans un lac abritant des poissons constituerait un précédent dans le nord de la Saskatchewan». [B. Fallis, Transcript of Public Hearings for the McArthur River and Cigar Lake Projects, Saskatoon, Saskatchewan, le 18 septembre 1996, p. 148.] Par ailleurs, Environnement Canada a recommandé qu'on envisage la possibilité d'enfouir les résidus dans l'une des mines désaffectées du site avoisinant du lac McClean. [Environnement Canada, Technical Position on the Cigar Lake Uranium Project, septembre 1996, p. 11.]

Les deux solutions, submersion et enfouissement, comportent des éléments d'incertitude qui pourraient se traduire par des dommages environnementaux. On pense que le dépôt des résidus dans le lac 497 n'entraînerait pas une détérioration inacceptable de l'habitat du poisson; toutefois, il est possible que des conditions futures, imprévisibles pour le moment, entraînent une baisse du niveau de l'eau, ce qui aurait pour effet d'exposer les résidus à l'oxygène atmosphérique. Par ailleurs, l'excavation des mines du lac McClean n'est pas encore terminée et l'hydrogéologie du secteur les rend inadéquates à des fins de stockage de résidus miniers. Qui plus est, on prévoit que les puits de mines Sue ne seront pas entièrement excavés au moment où l'exploitation de la mine du lac Cigar débutera, ce qui signifie qu'il faudra déposer les stériles en surface, où ils seraient en contact avec l'oxygène atmosphérique durant plusieurs années. Au moment où l'élimination des déchets pourrait commencer, le processus d'acidification serait déjà bien amorcé dans l'amas de stériles.

Comme on peut le constater grâce à ces exemples, on ne peut adopter aucune des solutions d'élimination des résidus avec l'assurance totale que les impacts futurs de l'option choisie seront acceptables. Notons toutefois qu'en principe, nous ne favorisons pas l'utilisation de lacs comme décharges si d'autres solutions sont envisageables. D'un point de vue écologique, la transformation d'un lac en dépotoir semble incompatible avec les principes de la protection de l'environnement, surtout s'il existe des mines désaffectées dans les environs. Nous sommes donc généralement d'accord avec la position énoncée par Environnement Canada :

Il semble que l'enfouissement sous terre de tous les stériles, déchets spéciaux et résidus miniers puisse permettre d'atténuer tous les problèmes environnementaux à long terme que pourraient causer les amas de stériles et les puits inondés. Cette méthode est la solution que privilégie Environnement Canada pour l'élimination de tous les résidus solides produits par les nouvelles mines de la Saskatchewan. [Environnement Canada, Technical Evaluation of the Environmental Impact Statement, Midwest Uranium Project, août 1995, p. 20.]

Idéalement, les puits de mines utilisés comme lieux d'enfouissement des déchets doivent être entièrement remplis, puis recouverts de plusieurs mètres de résidus propres et de moraine afin d'éviter la formation d'étangs d'eau à la surface. Avec le temps, les contaminants présents dans les déchets peuvent en effet se diffuser vers le haut dans ces étangs et poser des risques pour la santé des personnes ou des animaux qui boiraient cette eau.

2.2 Installations de concentration et de traitement des résidus

2.2.1 Le processus de concentration

La concentration du minerai extrait des mines d'uranium est un processus bien connu et largement utilisé. La chimie du processus est quelque peu complexe [The Cigar Lake Project Environmental Impact Statement, Response to Request for Additional Information on the Cigar Lake Project, Cigar Lake Mining Corporation, mars 1996, p. 4 - 1.], mais notons tout de même les principales opérations :

  • broyage du minerai extrait afin d'exposer les minéraux d'uranium à l'action des réactifs chimiques;
  • oxydation de tout l'uranium présent pour l'obtention du dioxouranium(VI), UO2++;
  • extraction de l'uranium et séparation de l'uranium des autres métaux présents dans le minerai;
  • précipitation de l'uranium en diuranate d'ammonium (NH4)2U2O7ou en sulfate d'uranyl basique (UO2)2SO4(OH)2;
  • grillage du précipité pour l'obtention du yellowcake, U3O8;
  • neutralisation des résidus;
  • dépôt des résidus à l'installation de traitement des résidus.

Dans le cas de certains minerais, d'autres métaux tels le nickel, le cobalt ou le molybdène sont également extraits au cours de procédés distincts.

Ces procédés sont utilisés avec succès depuis de nombreuses années, mais il est évident qu'il est toujours possible de les améliorer. Par exemple, lorsque le gouvernement de la Saskatchewan a demandé à Cogema Resources Inc. d'effectuer des recherches afin de trouver des moyens de réduire les quantités de produits chimiques utilisés pour le traitement du minerai comme condition de l'approbation de l'usine du lac McClean, [The Government's Position on Proposed Uranium Mining Developments in Northern Saskatchewan, Province de la Saskatchewan, décembre 1993.] on a constaté qu'il a été possible d'apporter des changements qui ont entraîné une réduction de 28 % du volume des stériles produits. [The Midwest Project Environmental Impact Statement, Main Document, Cogema Resources Inc., août 1995, p. 3-4.] Il y a donc peu de doutes qu'un programme de recherche soutenu permettrait de rendre le processus de traitement encore plus efficace en ce qui a trait à la quantité de produits chimiques requis et à la toxicité des stériles. Étant donné les vastes réserves d'uranium déjà repérées dans le nord de la Saskatchewan et les possibilités de découverte de gisements additionnels, tout indique que l'exploitation des mines d'uranium se poursuivra pendant encore plusieurs décennies et qu'un programme de recherche appliquée constituerait un excellent investissement. Par conséquent, nous recommandons que la province, en collaboration avec l'industrie, prenne des mesures afin de favoriser la mise en place d'un programme de recherche continu visant à améliorer le processus de broyage du minerai.

2.2.2 Les effluents liquides

Les opérations de concentration produisent des eaux usées contaminées qui doivent être traitées avant d'être rejetées dans l'environnement. Les autres effluents liquides qu'il faut également décontaminer sont les eaux d'exhaure et les eaux interstitielles extraites des stériles. Le processus de traitement vise principalement à réduire la concentration de radionucléides et de métaux lourds toxiques dans les effluents, par l'addition de réactifs qui forment des précipités avec les ions métalliques. Par exemple, on élimine le radium en ajoutant du chlorure de baryum afin de produire deux précipités, soit le sulfate de baryum et le sulfate de radium. Ce procédé diminue les concentrations de radionucléides du radium et d'autres métaux lourds, mais provoque une augmentation de la concentration des sels solubles (principalement les chlorures et les sulfates) dans la solution.

Le traitement des effluents liquides représente donc une situation conflictuelle en matière environnementale, qui implique que l'atténuation d'un problème (l'élimination des métaux lourds et des radionucléides) en crée ou en accentue un autre (accroissement de la salinité). L'impact environnemental d'une augmentation de la salinité est jugé acceptable pour deux raisons : une salinité accrue est moins néfaste que des concentrations élevées de radionucléides et de métaux lourds, et le changement de salinité dans les eaux réceptrices n'est pas permanent. Après la désaffectation de la mine, une fois le traitement des effluents terminé, la concentration saline diminuera jusqu'à atteindre les niveaux naturels et tous les organismes qui avaient été éliminés en raison de ce changement de salinité pourront revenir et reconstituer leur population dans le milieu.

Les procédés de précipitation réduisent les concentrations de radionucléides et de métaux lourds, mais ne permettent pas de les éliminer totalement des effluents. Par conséquent, l'apport total de ces contaminants dans l'environnement peut demeurer considérable si des volumes d'effluents importants sont rejetés. Même si les teneurs en radionucléides et en métaux sont très faibles, un fort volume d'effluents suppose que des quantités étonnamment élevées de ces éléments pénètrent dans l'environnement. Par exemple, le ministère des Pêches et des Océans du Canada a calculé que le projet du lac McClean entraînerait le rejet de 103 230 kg d'uranium dans les effluents produits. [Position and Technical Review of the Response to the Uranium Mines Review Panel Request for Additional Information concerning the Complementary McClean Lake and Midwest Projects, McClean Lake Project, ministère des Pêches et Océans, Région du Centre et de l'Arctique, mémoire à la commission, mars 1993.]

La propagation des radionucléides et des métaux peut être limitée s'ils sont absorbés par les sédiments et les particules en suspension. Les contaminants se propageront moins si les effluents sont déversés dans un marais ou un lac dont l'eau est en contact avec des sédiments organiques durant une longue période que s'ils sont rejetés dans une rivière ou un lac ayant un fort taux de renouvellement.

Les deux problèmes posés par les effluents liquides sont antagonistes; une atténuation de l'un (salinité) suscite une accentuation de l'autre (apport total de radionucléides et de métaux lourds dans l'environnement). De plus, les moyens utilisés pour résoudre l'un ou l'autre de ces problèmes sont incompatibles. Dans le premier cas, les effluents doivent être dilués le plus rapidement possible afin que les sels soient évacués du système, alors que dans le deuxième, on vise à confiner les effluents le plus longtemps possible de sorte que les contaminants puissent être absorbés lors de la solution.

Il existe cependant une solution applicable aux deux problèmes : la réduction du volume des effluents grâce à une diminution du débit entrant et au recyclage de la plus grande quantité possible de l'eau utilisée pour les opérations de broyage. Il y aurait une deuxième solution compatible aux deux situations exposées, soit extraire des eaux usées les radionucléides et les métaux par d'autres procédés, comme l'absorption par des particules organiques ou les colonnes échangeuses d'ions. Ces deux options méritent de faire l'objet d'études plus poussées.

Nous voulons ici réitérer les trois recommandations énoncées précédemment en ce qui concerne les rejets d'effluents liquides. D'abord, il faudrait mettre sur pied un programme de recherche visant à trouver des moyens novateurs de réduire le volume des effluents et la quantité de produits chimiques utilisés pour traiter les eaux usées. Le but visé devrait être la conception d'une usine de traitement ne produisant aucun effluent et de méthodes d'exploitation minière donnant lieu à des quantités infimes d'effluents liquides.

Deuxièmement, il faudrait adopter des normes de qualité de l'eau de surface qui seraient propres à la région de l'Athabasca, plutôt que des normes s'appliquant à l'ensemble de la Saskatchewan. Les Objectifs de qualité des eaux de surface de la Saskatchewan, applicables au sud de la province où l'on retrouve souvent de fortes concentrations de matières totales dissoutes (MTD), ne conviennent pas toujours à la région de l'Athabasca. En outre, les nouvelles normes devraient englober des critères de qualité de l'eau pour l'uranium dans le biote aquatique ainsi que pour tout ion ou élément important, dont on ne tient pas compte actuellement.

Troisièmement, l'apport total dans l'environnement devrait être précisé pour tous les contaminants. Les propriétaires de chaque mine devraient être tenus d'établir un bilan matières pour tous les contaminants présents dans les effluents produits. Grâce à leurs programmes de surveillance, ils devraient être en mesure de déterminer le degré de propagation des contaminants dans le bassin hydrographique. En outre, le Saskatchewan Environment and Resource Management devrait tenir un registre cumulatif à partir des rapports fournis par les entreprises minières. La propagation des contaminants à l'échelle régionale serait surveillée par le Groupe de Travail sur les effets cumulatifs (voir section 2.4). Il est essentiel d'acquérir une meilleure connaissance de la façon dont ces contaminants se répandent dans l'environnement.

2.2.3 Les résidus

La composition des résidus produits par le processus de concentration du minerai d'uranium est déterminée par les produits chimiques qui sont ajoutés pour leur traitement et par la minéralogie du minerai. Par exemple, si le minerai contient une forte concentration d'arsenic ou d'un autre métal toxique, les résidus renfermeront également de grandes quantités de ce même métal. De plus, les métaux présents dans les résidus seront chimiquement plus solubles, et par conséquent plus mobiles, qu'ils ne l'étaient dans le corps minéralisé. Cela s'explique par le fait que les constituants d'un minerai intact ont atteint un état d'équilibre dans lequel les métaux se sont combinés à d'autres éléments pour former des minéraux insolubles; toutefois, le processus de concentration, qui implique la fragmentation du minerai et l'oxydation des minéraux exposés, permet d'obtenir des éléments métalliques sous une forme plus soluble.

Bon nombre des métaux lourds dont on rompt l'état d'équilibre par divers procédés sont toxiques et parfois radioactifs. Il est donc primordial de veiller à ce qu'ils ne soient pas rejetés dans l'environnement, où ils pourraient lourdement contaminer les eaux de surface ou les nappes phréatiques. Comme leur retour à l'état d'équilibre, où ils sont insolubles et donc immobiles, ne se fera que sur une très longue période, il est nécessaire d'adopter des mesures de confinement qui dureront indéfiniment.

Comme il faut assurer un confinement à perpétuité, on peut présumer que le recours à des structures artificielles ne constituera probablement pas une solution satisfaisante. Les tentatives en vue de contenir les résidus derrière des barrages artificiels, par exemple, pourraient causer des problèmes environnementaux pour les générations à venir si ces barrages ne résistent pas à l'épreuve du temps. Comme il existe très peu de structures construites par l'homme dont la durée utile a dépassé la période de temps requise pour le confinement adéquat des résidus, il semblerait plus logique de faire appel aux barrières naturelles, qui ne se modifient qu'à l'échelle des temps géologiques. C'est d'ailleurs pour cette raison que dans les installations de gestion de résidus dont on a planifié la mise en oeuvre récemment (lac Rabbit, lac Key et lac McClean), on a utilisé des mines désaffectées, où les barrières physiques sont des formations rocheuses en place depuis des millions d'années. [Opportunity North, Northern Mines Monitoring Secretariat Supplement, vol. 4, n o3, 1997.]

Le stockage souterrain des résidus avec un recouvrement adéquat élimine à court terme la possibilité d'un contact avec le biote à la surface de la terre. L'éventualité d'une contamination à long terme par migration des métaux toxiques ou radioactifs dans la nappe phréatique demeure cependant le véritable problème. Les responsables de tous les puits de stockage de résidus existants ou projetés ont effectué des études de modélisation qui montrent que, dans la plupart des cas, les résidus s'amalgament pour former un bouchon étanche et que la migration des contaminants se fait très lentement. Nous espérons sincèrement que ces exercices de modélisation s'avéreront assez exacts, mais l'expérience nous a enseigné qu'il est imprudent de confondre les études de modélisation avec la réalité. Nous avons donc recommandé que l'on surveille attentivement le rendement de ces installations afin de vérifier si la consolidation se produit et que la vitesse de migration des contaminants se situe en deçà des limites acceptables. En outre, il importe de définir, avant de commencer le stockage des résidus, des mesures d'atténuation réalistes pour remédier à tout problème éventuel du système.

Compte tenu de notre connaissance actuelle des installations de gestion des résidus, nous avons conclu que le stockage souterrain est préférable au dépôt à la surface du sol et qu'il faudrait, chaque fois que cela se révélera possible, prendre les mesures nécessaire pour enfouir les résidus qu'on a par le passé laissés en surface. Nous approuvons également la pratique actuelle selon laquelle plusieurs mines font un usage commun d'une seule usine de traitement et d'une seule installation de stockage des résidus. La complexité de la surveillance et de l'entretien à long terme de ces installations sera directement proportionnelle au nombre de sites existants. Il faudra choisir ces sites de stockage souterrain avec le plus grand soin; il est habituellement préférable d'attendre qu'une mine ait été complètement excavée et qu'on ait étudié tous les aspects de la géologie et de l'hydrogéologie des formations environnantes avant de l'utiliser comme site de stockage.

Notre recommandation la plus pressante concernant les installations de gestion des résidus est celle-ci : que ces installations soient l'objet d'une surveillance stricte dès le tout début de leur utilisation et qu'un programme de vérification de durée indéfinie soit établi pour tous les sites de stockage des résidus du nord de la Saskatchewan. Étant donné que la technique de confinement dans des puits de mine ne pourra être considérée totalement fiable tant qu'on n'aura pas prouvé qu'il y a effectivement consolidation des résidus et que la vitesse de migration des contaminants est faible, il ne sera sans doute pas possible d'évaluer de manière satisfaisante le rendement de ces installations, avant plusieurs décennies. D'ici là, les propriétaires de mines devraient assumer les coûts de toute mesure d'atténuation qui pourrait être requise. Par la suite, le gouvernement provincial pourrait prendre en charge les activités de surveillance et d'atténuation des impacts, si cela se révèle nécessaire.

C'est pour cette raison que la commission a recommandé la création d'un fonds d'urgence qui permettrait de couvrir les frais courants de la surveillance à long terme (et des mesures d'atténuation requises, le cas échéant), une fois que la responsabilité des sites sera confiée à la province. [D.G. Lee, J.F. Archibald et R. Neal, Projet de mine d'uranium de McArthur River, Approvisionnements et Services Canada, février 1997, p. 57.] La constitution d'un fonds financé par l'ensemble de l'industrie offrirait une meilleure protection financière aux générations futures et serait moins coûteuse, en bout de ligne, que la création de fonds individuels pour chacun des sites. On pourrait également désigner un seul organisme responsable de la gestion du fonds et de la supervision des travaux d'entretien, des activités de surveillance et des mesures d'atténuation à toutes les mines d'uranium et aux usines de traitement désaffectées. L'organisme responsable devrait installer ses bureaux dans le nord de la Saskatchewan et employer en majorité des habitants de la région.

2.3 Désaffectation des mines

La Saskatchewan est un important producteur d'uranium depuis 1953. Durant les vingt premières années, la production minière se concentrait sur la rive nord du lac Athabasca, dans le secteur d'Uranium City; trois usines (Gunnar, Lorado et Eldorado) étaient exploitées dans cette région. Vers le milieu des années 1970, l'exploitation des mines d'uranium s'est déplacée plus au sud, dans le bassin de l'Athabasca, aux sites toujours actifs des lacs Cluff, Key et Rabbit. Plus récemment, de nouveaux projets miniers ont été approuvés à la rivière McArthur et au lac McClean.

À ce jour, aucune mine d'uranium du nord de la Saskatchewan n'a encore été complètement désaffectée. Bien que des travaux initiaux en ce sens aient été amorcés à la mine Eldorado au début des années 1980, les activités de déclassement se poursuivent toujours dans le but d'atténuer les préoccupations que suscite la question de la gestion des résidus. L'histoire de la mine Eldorado explique pourquoi son déclassement s'étend sur une si longue période : la mine est entrée en activité au milieu des années 1950, à une époque où on se souciait peu, principalement par ignorance, de la conception de sites de traitement des résidus qui assureraient la protection de l'environnement ou le confinement à long terme des contaminants.

Les deux autres exploitations minières situées sur la rive nord du lac Athabasca, Gunnar et Lorado, appartenaient à des intérêts privés; il n'y donc pas eu de déclassement ni de remise en état des terrains lorsque les propriétaires ont mis fin aux opérations au milieu des années 1960. Par conséquent, chaque site continue de rejeter diverses quantités de contaminants dans l'environnement. En outre, tous les bâtiments de la mine Gunnar ont été laissés tels quels et se sont détériorés au point de constituer eux aussi des dangers publics.

L'une des questions fréquemment soulevées durant les audiences publiques, surtout par les habitants du Nord, concernait la capacité ou la volonté des propriétaires de voir au déclassement réussi des mines existantes et de toute nouvelle mine qui pourrait être approuvée. À ce jour, ni l'industrie ni le gouvernement n'a démontré un engagement ferme envers le déclassement adéquat des mines d'uranium abandonnées.

Au cours des quatre dernières années, les gouvernements du Canada et de la Saskatchewan ont autorisé un accroissement de la production d'uranium, ce qui procurera à l'un et l'autre des avantages considérables. Il serait par conséquent fort opportun pour les gouvernements fédéral et provincial de s'attaquer à l'épineuse question de l'héritage environnemental des mines d'uranium, en unissant leurs efforts pour assurer le déclassement total de toutes les mines d'uranium abandonnées et des sites de stockage des résidus en Saskatchewan.

2.3.1 Garanties financières

Durant les audiences tenues en 1993, le public a clairement fait entendre qu'il incombait aux entreprises minières, et non au gouvernement ou aux contribuables, d'assumer les coûts de la fermeture définitive des mines. Cette position ferme du public sur le sujet résulte de la façon dont les propriétaires des mines situées près d'Uranium City ont abandonné les sites une fois qu'ils n'étaient plus profitables, laissant à l'État le fardeau financier du déclassement et de la remise en état des terrains.

Dans notre rapport d'octobre 1993, nous avons recommandé qu'avant approbation d'un projet, une garantie financière soit obtenue du promoteur en vue de couvrir les frais de désaffectation et post-désaffectation» . [D.G. Lee, J.F. Archibald, J. Dantouze, R. Neal et A. Yassi, Dominique-Janine Extension, McClean Lake Project et Midwest Joint Venture, Approvisionnements et Services Canada, octobre 1993, p. 17.] En 1996, au cours des audiences tenues pour un projet subséquent, nous avons appris que l'obligation de fournir une telle garantie avait force de loi en Saskatchewan depuis le 5 mars 1996, à la suite de modifications apportées au Mineral Industry Environmental Protection Regulations, et que la Commission de contrôle de l'énergie atomique (CCEA) avait atteint le même objectif en modifiant le Règlement sur les mines d'uranium et de thorium.

Ces modifications qui ont été apportées aux règlements fédéral et provincial sur le déclassement des mines d'uranium assurent une mesure de protection des contribuables.

2.3.2 Fonds d'urgence de l'exploitation de l'uranium

Tout au long des audiences publiques portant sur les sept projets présentés, les intervenants ont insisté sur le fait que les mines et les lieux de stockage des résidus devront faire l'objet d'une surveillance qui se poursuivra longtemps après l'arrêt de l'exploitation, en raison de la toxicité de bon nombre des contaminants en cause. Nous sommes d'accord avec eux. Nous croyons que la création d'un fonds exclusif et autonome serait la meilleure façon de financer les activités de surveillance qui suivront la désaffectation et les coûts de toute mesure d'atténuation qui pourrait être requise.

Nous avons recommandé la création de ce fonds pour la première fois dans le rapport traitant du Projet de McArthur River, soulignant que l'installation de gestion des résidus de Deilmann, en particulier, nécessiterait la mise en place d'un programme de surveillance et de mesures d'atténuation éventuelles.

Le gouvernement de la Saskatchewan a répondu ainsi à cette recommandation :

Reconnaissant sa responsabilité à l'égard de la gestion à long terme du site, la province est en train d'examiner les options possibles, y compris la création d'un fonds d'urgence, comme l'a proposé la commission, pour la mise en oeuvre d'un programme de surveillance et le financement des mesures d'atténuation éventuelles. [The Government's Position on Proposed Uranium Developments in Northern Saskatchewan, McArthur River Project, gouvernement de la Saskatchewan, mai 1997, p. 21.]

La recommandation visant la constitution d'un fonds d'urgence, répétée dans les rapports sur les projets Midwest et Cigar Lake, est aussi reprise ici. Il serait préférable d'établir ce fonds pour répondre à l'ensemble des préoccupations concernant les coûts de la désaffectation plutôt que pour chaque projet de mine d'uranium. Nous invitons le gouvernement à mettre sur pied le Fonds d'urgence de l'exploitation des mines d'uranium le plus tôt possible.

2.3.3 Recherche continue

Les règlements sur les mines adoptés par les gouvernements fédéral et provincial exigent du promoteur qu'il dresse un plan de désaffectation conceptuel propre à chaque site exploité. Ce plan, qui décrit notamment les activités de désaffectation et les coûts prévus à cet égard, doit être soumis, examiné et approuvé avant qu'on n'accorde l'autorisation d'exploiter la mine. Les plans conceptuels sont jugés acceptables si les sites peuvent être désaffectés à l'aide des techniques existantes.

Les promoteurs et les législateurs ne doivent pas faire preuve de complaisance à l'égard des techniques existantes; il faut poursuivre les efforts de recherche, dans le but précis de faire progresser les méthodes de désaffectation, de manière à réduire au minimum les incidences environnementales causées par l'activité minière. Il est impératif de tout faire pour rétablir les secteurs perturbés dans les conditions les plus similaires possibles à celles qui prévalaient avant l'exploitation et de voir à la stabilité physique et chimique à long terme des sites.

2.3.4 Participation locale

Durant les audiences publiques, il est apparu évident que les citoyens, et en particulier les habitants du Nord, désirent que les collectivités de la région soient consultées au sujet des plans de désaffectation initiaux et finaux. Comme ce seront leurs descendants qui devront vivre à proximité des mines désaffectées, il est important que ces citoyens prennent part non seulement à l'élaboration des plans, mais aussi à la mise en oeuvre des activités de désaffectation, de remise en état et de surveillance subséquente. Les comités de la qualité de l'environnement représentent à cet effet un outil idéal pour la consultation des collectivités touchées.

2.4 Mesures de surveillance et d'atténuation

L'engagement des promoteurs à surveiller les concentrations de contaminants dans les composantes non biotiques de l'air, de l'eau, du sol et des sédiments contraste fortement avec leur apparente réticence à surveiller les effets biologiques. Ils reconnaissent en effet la pertinence de mesurer les rejets de contaminants et leurs concentrations dans certains organismes tels que les poissons; ils refusent toutefois de tenir compte des effets de ces contaminants sur le biote des secteurs voisins des mines. Par exemple, dans sa réponse au rapport sur le projet de la rivière McArthur, le promoteur s'est opposé à la surveillance des effets biologiques en donnant comme argument que l'évaluation des risques effectuée par Cameco Corporation avait permis de conclure que le projet aurait peu d'incidences sur les organismes. [Cameco Corporation, McArthur River Project, Response to the Report of the Joint Federal-Provincial Panel, avril 1997, p. 19.] La position de Cameco était intenable; la commission a d'ailleurs abordé directement dans son rapport les limites d'une évaluation d'impact se fondant uniquement sur une évaluation des risques. [D.G. Lee, J.F. Archibald et R. Neal, Projet de mine d'uranium de McArthur River, Approvisionnements et Services Canada, février 1997, p. 42.] Prenons une situation analogue, soit l'analyse des risques que pose le rayonnement pour la santé des travailleurs de la mine et de l'usine de concentration. Cameco a conclu que le risque d'exposition était très faible, mais elle n'a pas fait valoir, conséquemment, qu'il était inutile de surveiller la santé de ces travailleurs.

Nous avons recommandé d'étendre à tous les sites miniers la surveillance des effets biologiques, de façon à englober toutes les composantes valorisées de l'écosystème pour lesquelles on doit évaluer les effets cumulatifs à des emplacements plus éloignés. De plus, nous proposons d'élargir le groupe technique chargé de fournir des conseils au sujet des protocoles de surveillance, de sorte qu'il compte des experts compétents des universités et des organismes gouvernementaux. Il est suggéré que ce groupe technique tienne à intervalles réguliers des ateliers ouverts au public et aux comités de la qualité de l'environnement, au cours desquels il examinerait et commenterait les efforts de surveillance des effets biologiques associés aux mines d'uranium. Ces recommandations ont été appuyées par bon nombre d'habitants du Nord, y compris des représentants des comités de la qualité de l'environnement.

Tout au long du processus d'audiences publiques, l'une des plus grandes inquiétudes des citoyens était liée au fait que les mines d'uranium puissent polluer irrémédiablement l'eau et le biote des environs des exploitations minières. Les gens ne sont pas rassurés par les analyses de risque et les études de modélisation qui semblent indiquer que leurs craintes sont sans fondements; ils exigent que les entreprises minières démontrent que les contaminants seront contenus de manière satisfaisante et qu'ils ne causeront pas de dommages aux écosystèmes de la région. On ne pourra répondre à ces attentes qu'en élaborant des programmes de surveillance conçus avec soin et mis en oeuvre avec la participation des collectivités locales.

En réponse à la recommandation faite en 1993 par la commission, le Saskatchewan Environment and Resources Management et la Commission de contrôle de l'énergie atomique ont mis sur pied en 1994 un programme de surveillance des effets cumulatifs dans le but de déterminer les impacts régionaux des mines d'uranium sur l'environnement. Nous sommes réconfortés par cette initiative et nous remarquons que les deux partenaires ont formé un groupe de travail sur la surveillance des effets cumulatifs. Ce groupe a permis à un large éventail de spécialistes d'exprimer leur point de vue et, par la suite, a encouragé les habitants de la région à contribuer au prélèvement d'échantillons du biote. Nous encouragerons tout nouvel effort en vue d'associer les habitants du Nord au programme de surveillance et aux résultats obtenus.

Par ailleurs, nous recommandons de procéder à un prélèvement complet de carottes de sédiments à certains endroits clés (p. ex. aux décharges du lac Wollaston dans les réseaux des rivières Fond du Lac et Cochrane) afin d'obtenir des données historiques sur le flux des contaminants dans la région. Ces prélèvements permettraient éventuellement d'évaluer avec précision la propagation régionale des contaminants provenant des mines.

Nous recommandons également une surveillance perpétuelle des installations de stockage des résidus (section 2.2.3) et des déchets miniers potentiellement acidifiants.

Le choix du terme «perpétuel» par la commission a fait l'objet de débats durant les audiences publiques; il importe que la commission précise sa pensée à ce sujet. Il faut tenir compte de deux facteurs au moment de déterminer la période de temps requise pour la surveillance. D'abord, le confinement des contaminants dépendra de l'intégrité structurelle des solutions techniques qui devront durer des dizaines de milliers d'années, soit beaucoup plus longtemps que la totalité de l'histoire de l'humanité. Lorsque les résidus sont déposés dans des puits de mine désaffectés, il est plus rassurant de savoir que la barrière rocheuse naturelle ne changera que sur une échelle de temps géologiques. Dans le cas des installations en surface, le confinement dépendra plutôt de l'intégrité structurelle des barrages de retenue, des couvertures de roche ou de terre et des digues de dérivation. Le dépôt des stériles acidifiants dans un lac repose sur l'assurance qu'il y subsistera pendant longtemps une couverture d'eau d'une profondeur suffisante pour éviter l'oxydation. Les deux méthodes sont sujettes à faire éventuellement défaut. Les structures artificielles se détérioreront lentement sous l'effet du temps, et les changements climatiques, imprévisibles aujourd'hui, pourraient se traduire, dans un avenir lointain, par une baisse du niveau des lacs.

Deuxièmement, les contaminants pourraient se déplacer à une vitesse extrêmement lente, même si les ouvrages de confinement sont inefficaces. La migration des contaminants dans la nappe phréatique pourrait être de l'ordre de quelques centimètres à quelques mètres par siècle, selon la porosité de la roche ou de la moraine. Par conséquent, il pourrait s'écouler bien des siècles avant que les quantités de contaminants dans les secteurs avoisinants atteignent un seuil critique.

En raison de ces facteurs, il serait sage de surveiller ces sites pendant au moins quelques siècles afin de pouvoir confirmer les prédictions faites à l'aide de modèles. Donc, lorsque la commission affirme que la surveillance doit être perpétuelle, elle entend par là que le programme doit se poursuivre indéfiniment.

Les programmes concrets de surveillance seront propres à chaque site. Il faudra vérifier la qualité de l'eau souterraine et de surface, ainsi que l'intégrité de toute structure artificielle. Comme la plupart des changements possibles surviendront probablement très graduellement, la surveillance pourrait se faire à des intervalles irréguliers et de plus en plus longs, par exemple tous les dix à cinquante ans. Conséquemment, les intérêts composés d'une petite somme d'argent placée dans un fonds suffiraient à financer les activités de surveillance à perpétuité.

L'accès à des fonds suffisants pour atténuer à la source les effets de toute déficience des mesures de confinement est tout aussi important que le financement du programme de surveillance perpétuelle. Nous avons recommandé à cette fin la création du Fonds d'urgence de l'exploitation des mines d'uranium (voir la section 2.3.2).

Enfin, nous recommandons d'encourager la participation des habitants du Nord à tous les aspects de la surveillance. Les entreprises minières, qui s'occupent de la plupart des activités de surveillance sur les sites, embauchent les habitants locaux comme techniciens. Vraisemblablement, à mesure qu'ils acquerront formation et expérience, ces gens pourront assumer des tâches de supervision et de gestion des programmes de surveillance. Les organismes de réglementation se sont efforcés d'employer des habitants de la région pour la collecte de certaines données de surveillance et de confier un rôle consultatif aux comités de la qualité de l'environnement (CQE).

Nous reconnaissons et louons ces efforts d'intégration des habitants du Nord. Toutefois, comme on l'a mentionné dans le rapport sur le projet du lac Cigar, de nombreux habitants de la région sont insatisfaits de leur rôle, préférant agir comme partenaires à part entière dans le processus. Nous recommandons que les organismes de réglementation adoptent des objectifs de recrutement pour les habitants du Nord, qui soient similaires à ceux dont s'est dotée l'industrie minière qu'ils régissent. Cette mesure s'inscrit dans le long terme; pour l'avenir immédiat, la participation sera assurée principalement par les activités des comités de la qualité de l'environnement.

Nous sommes encouragés par les activités des CQE et tenons à féliciter les entreprises minières et les organismes gouvernementaux pour leur engagement à travailler de concert avec ces comités et à les soutenir. Nous sommes cependant extrêmement conscients de l'ampleur de la tâche qui les attend. Il est donc essentiel de fournir une aide financière continue et suffisante qui permettra à ces comités d'examiner en profondeur les nombreux aspects de l'exploitation des mines d'uranium dans le nord de la Saskatchewan.

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3.0 Problèmes de sécurité

L'histoire nous apprend que les mines, quelles qu'elles soient, ont depuis toujours la réputation d'être des lieux de travail relativement dangereux. La littérature elle-même regorge d'histoires de mineurs et de leurs familles éprouvés par le malheur. Les temps modernes ne sont pas exempts d'accidents, comme les coups de grisou, qui ont entraîné la perte de nombreuses vies humaines.

Par leur nature, les mines d'uranium sont exemptes des conditions qui sont à l'origine des explosions dans les mines de charbon, mais ceux qui y travaillent ont encore besoin d'être protégés contre différents dangers, tels les chutes de pierres qui se détachent des voûtes des galeries. Outre les problèmes de sécurité minière habituels, il faut aussi protéger les travailleurs des mines d'uranium contre les rayonnements. Étant donné que ces rayonnements ne peuvent être décelés par les sens et que leurs effets sur l'organisme ne se manifestent qu'après y avoir été exposé pendant de nombreuses années, ils constituent une menace pernicieuse pour la santé de ces travailleurs.

Au cours des six dernières années, nous avons visité les installations de la plupart des mines d'uranium souterraines en Saskatchewan et de toutes les mines à ciel ouvert. Dans le présent chapitre, nous passerons en revue les mesures adoptées pour assurer la protection des travailleurs de ces gisements, et nous ferons quelques recommandations d'ordre général à partir de nos observations.

3.1 Protection contre les rayonnements

Nous sommes heureux d'affirmer qu'aucune des propositions qui ont été examinées relativement à l'importance d'assurer la protection des travailleurs contre les rayonnements n'a été sacrifiée aux objectifs de rentabilité ou d'efficacité des opérations minières. De fait, une large part des compagnies minières ont élaboré des méthodes d'exploitation novatrices qui permettent d'assurer une protection maximale des travailleurs contre ce danger. Par exemple, les promoteurs des mines du lac Cigar, de la rivière McArthur et de Midwest, qui recèlent du minerai à teneur en uranium exceptionnellement élevée, ont proposé des méthodes originales pour extraire le minerai à distance. Le recours à des processus automatisés d'extraction, décrits dans d'autres ouvrages, [The Cigar Lake Project Environmental Impact Statement, document principal, Cigar Lake Mining Corporation, juillet 1995, pp. 3 - 30 à 3 - 77. The McArthur River Project Environmental Impact Statement, tome principal, Cameco Corporation, octobre 1995, pp. 2.3.1 à 2.3.24. The Midwest Project Environmental Impact Statement, document principal, Cogema Resources Inc., août 1995, pp. 2 - 17 à 2 - 47.] assurent la mise en valeur des mines sans que les travailleurs n'aient à pénétrer à l'intérieur de la cavité où se trouve le minerai. De plus, les opérations minières sont conçues de manière à confiner le minerai dans des conduites fortement blindées tout au long du processus d'extraction, éliminant ainsi pratiquement tout risque d'exposition pour les travailleurs.

Au cours des deux dernières décennies, le recours à des technologies plus perfectionnées a permis d'assurer une surveillance, non pas périodique, mais constante et précise du degré d'exposition aux rayonnements subi par les travailleurs. Les recherches de certains promoteurs ont débouché sur la création d'outils efficaces destinés à la surveillance des sources de rayonnements et à la dosimétrie personnelle. Outre l'utilisation de toute une gamme de moniteurs de rayonnements, les compagnies minières ont mis sur pied des programmes complets de formation en matière de radioprotection.

Le perfectionnement des techniques de modélisation des systèmes de ventilation, qui tiennent compte des sources de rayonnements, constitue une autre innovation bénéfique. La modélisation, contrairement aux processus d'essais et d'erreurs qui peuvent mettre en danger la santé des travailleurs, a permis aux concepteurs de mines de faire une évaluation des conséquences de différentes méthodes d'exploitation minière. Grâce à ces modèles, les promoteurs sont à même d'utiliser les techniques d'exploitation minière qui offrent la meilleure protection pour la santé des travailleurs.

Les mineurs interrogés se sont déclarés satisfaits de la formation qu'ils ont reçue et du respect des normes de sécurité dans leur milieu de travail. En outre, les enregistrements des niveaux d'exposition aux rayonnements subis par les travailleurs montrent que les normes réglementaires ont été respectées dans les mines d'uranium de la Saskatchewan :

Il est par conséquent intéressant de souligner l'excellent travail de la Cigar Lake Mining Corporation en matière de contrôle des rayonnements au cours de la phase d'essai de la mine de Cigar Lake. L'exploitation d'une mine d'uranium souterraine où l'on réussit à maintenir un niveau d'exposition des travailleurs aux rayonnements à cinq pour cent de la dose limite annuelle établie en Saskatchewan constitue une réalisation importante. Cela prouve qu'il est possible, grâce aux nouvelles technologies minières proposées, de parvenir à un tel niveau de sécurité en matière de rayonnements, tout en extrayant un minerai dont la teneur s'élève à 20 pour cent d'uranium. [J. Parr, Saskatchewan Labour, Transcripts of the Public Hearings for McArthur River and Cigar Lake, Régina, Saskatchewan, 4 septembre 1996, p. 86.]

En dépit de telles percées technologiques, la réforme réglementaire ne semble pas avoir évolué au même rythme que les connaissances sur la radioprotection. La recherche et les nouvelles technologies ont en effet permis d'étendre ces connaissances. La population en général s'est montrée mécontente des normes disparates imposées par les gouvernements fédéral et provincial, ainsi que par les délais excessifs observés dans l'adoption de nouvelles normes. La législation actuelle sur la radioprotection, que les instances fédérale et provinciale se chargent de faire respecter, repose sur les recommandations CIPR-26 émises en 1977 par la Commission internationale de protection radiologique. Bien que les baux de surface provinciaux exigent des promoteurs qu'ils se conforment aux recommandations CIPR-60 plus sévères, aucun des paliers de gouvernement n'a entériné formellement ces recommandations, ou même les recommandations CIPR-65 plus récentes. C'est pourquoi les organes de réglementation des gouvernements fédéral et provincial devraient adopter sans plus attendre les nouvelles normes du CIPR.

3.2 Problèmes de sécurité habituels

Bien que la cote de sécurité à long terme des mines d'uranium de la Saskatchewan soit meilleure que celles des autres types de mines, trois décès sont quand même survenus dans ces mines en 1995. Les auteurs du présent rapport ont remarqué que l'augmentation des accidents peut être attribuée à la multiplication récente du nombre d'exploitations minières souterraines par rapport aux exploitations à ciel ouvert qui constituaient la norme auparavant. À la lumière de ces observations, on s'interroge sur le fait que la Saskatchewan, province possédant l'une des législations les plus avancées en matière de santé et sécurité au travail au Canada, n'ait pas encore mené à bien la refonte de sa réglementation minière qu'elle a entreprise en 1978.

Le secteur de l'exploitation des mines d'uranium de la Saskatchewan a connu une évolution plus marquée que la plupart des autres secteurs d'activités. La diligence dont l'industrie fait preuve dans l'adoption des dernières technologies minières novatrices qui font largement appel à l'automatisation, requiert que l'on modifie en conséquence la réglementation qui touche ce secteur en matière de santé et de sécurité au travail, en vue d'être en mesure d'assurer la sécurité des travailleurs.

Même si l'on élabore une réglementation adéquate, les mineurs dépendent de l'application efficace et judicieuse des règlements pour assurer la sécurité de leur milieu de travail. La nature particulière du travail dans les mines, où les employés peuvent être exposés à des conditions dangereuses dans des espaces très restreints et faiblement éclairés, exige une mise en application soutenue de normes convenant à ces conditions, ainsi qu'un suivi très sévère de la conformité. Le comité d'experts remarque que l'industrie minière fait l'objet d'une attention très particulière de la part des organismes de réglementation :

... Lorsqu'il s'agit de santé et de sécurité au travail, nul autre secteur industriel ne reçoit, en Saskatchewan, une attention comparable à celle accordée au secteur minier. Il y a proportionnellement beaucoup plus d'inspecteurs affectés aux mines qu'à tout autre milieu de travail. [J. Parr, Saskatchewan Labour, Transcripts of the Public Hearings for McArthur River and Cigar Lake, Régina, Saskatchewan, 4 septembre 1996, p. 79.]

Étant donné la minutie extrême dont fait preuve la province lors de ses inspections, il semble raisonnable de s'attendre à ce que l'examen de la refonte de la réglementation sur les mines soit aussi méticuleux. Toutefois, l'actuel projet provincial ne prévoit modifier la réglementation sur les mines qu'à la suite de l'examen de la réglementation du secteur industriel dans son ensemble. L'objectif énoncé laisse entendre qu'il existe un double système de surveillance en matière de santé et de sécurité au travail. Alors que la Occupational Health and Safety Act a été modifiée régulièrement au cours de la dernière décennie, la réglementation portant sur les mines n'a connu pour sa part aucun changement depuis les 20 dernières années. Afin de tenir compte des processus d'exploitation minière actuels et de l'usage sécuritaire des technologies modernes, la Saskatchewan devrait procéder sans délai à la refonte et à la mise à jour de sa réglementation dans ce secteur.

3.3 Problèmes de sécurité liés au transport

À tous les examens, des membres du grand public ont fait état des risques d'accidents routiers, ainsi que de leurs craintes à l'égard de la pollution des plans d'eau et des sols environnants que pourraient provoquer des déversements de matières dangereuses. Ils ont également manifesté leurs inquiétudes au sujet de l'état actuel des routes, ainsi que des répercussions entraînées par une recrudescence de la circulation routière.

En procédant à l'évaluation de chacune des propositions, la commission a reconnu que les effets du transport qui sont associés à l'un ou à l'autre des projets miniers étaient négligeables ou limités. Les plus grandes préoccupations portent sur l'accumulation des effets produits par les activités de transport d'un bon nombre de mines actuellement ou éventuellement exploitées dans une région géographique relativement restreinte du nord de la Saskatchewan. On sait qu'une seule mine peut nécessiter 15 transports quotidiens de minerai, de produits chimiques ou d'autres approvisionnements en vrac et que les répercussions d'une telle activité demeurent acceptables, mais les effets cumulés de l'exploitation simultanée de plusieurs mines se révèlent en effet une plus grande source d'inquiétude.

Parmi les dangers pour la sécurité que l'on peut associer au mouvement des véhicules lourds utilisés pour l'exploitation minière, mentionnons la visibilité réduite pour les autres usagers de la route en raison des nuages de poussière qui sont soulevés, la détérioration prématurée des surfaces de roulement et les risques supplémentaires inhérents aux types de chargements. Les promoteurs et le gouvernement doivent adopter à cet égard des mesures visant à contrôler la poussière des routes, à surveiller constamment l'état des surfaces de roulement, à procéder à leur réfection régulière et à établir des plans d'urgence pour chacun des risques éventuels.

Il incombe au gouvernement provincial de veiller à ce que les routes qui desservent ces projets soient en mesure de satisfaire l'ensemble des besoins, sans que cela ne se fasse au détriment des particuliers et des autres entreprises de la région. Il est impératif qu'une étude exhaustive de la pression exercée cumulativement sur le réseau routier du Nord soit menée, et tout nouveau projet minier ne devrait être approuvé en l'absence d'engagement formel à aménager des voies d'accès routières adéquates. En général, les normes utilisées pour les routes de section du réseau du Sud devraient être appliquées à tout le réseau routier du Nord. Ainsi, l'exploitation des gisements d'uranium du bassin de l'Athabasca pourrait aussi faire profiter la région, et pendant longtemps, d'une infrastructure routière améliorée.

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4.0 Répercussions sur la santé

La santé, on le sait bien, n'est pas seulement l'absence de maladie : c'est un état de bien-être physique, mental et affectif. Le mandat de la commission en tient compte, car il comprend l'examen des effets socio-économiques et des questions relatives à l'environnement et à la santé. Notre analyse de l'effet possible des projets d'exploitation des mines d'uranium sur la santé des travailleurs et des collectivités porte donc sur trois types d'effets possibles, à savoir les effets physiques directs, les effets socio-économiques et les effets psychologiques.

4.1 Santé des travailleurs

Pendant la période de six ans que couvrent les études sur l'exploitation de gisements d'uranium, des mesures ont été prises pour améliorer l'état de santé des mineurs et pour assurer leur sécurité. Entre autres mesures, indiquons la modification de l'Occupational Health and Safety Act de la Saskatchewan, ainsi que l'examen des Occupational Health and Safety Regulations qui se rattachent à cette loi et l'examen proposé des Mines Regulations , qui s'y rattachent également; la modification du Code canadien du travail (1996) et la mise en œuvre du Projet concernant l'efficacité de la fédération (1994). Par suite des recommandations de la commission, la province a modifié l'Occupational Health and Safety Appendix, qui porte sur les baux de surface des mines d'uranium, pour tenir compte des normes CIPR-60 et CIPR-65 de la Commission internationale de protection radiologique.

D'après les observations qui ont été présentées à la commission, il semble que la radioexposition des travailleurs des mines d'uranium en Saskatchewan est maintenue en deçà des doses limites. Collaborant avec les organes de réglementation, les exploitants de mines prévoient être en mesure de respecter les nouvelles limites d'exposition avec autant de succès. La commission applaudit à l'initiative qu'a prise récemment la province en décidant d'adopter les nouvelles normes internationales de protection contre les radiations, applicables aux travailleurs des mines d'uranium. Par contre, le temps que mettent les gouvernements fédéral et provincial à modifier les normes de sécurité applicables aux travailleurs des mines n'est pas sans nous préoccuper. Nous nous demandons si le processus de modification des dispositions réglementaires se poursuivra lorsque les examens publics seront terminés? Le fait que la province modifie les normes de protection contre les radiations au moyen de baux de surface nous préoccupe également, car ces baux n'ont pas le caractère permanent des règlements. Ces normes s'appliqueront-elles non seulement aux mines d'uranium, mais aussi aux autres milieux où les travailleurs pourraient être exposés à des radiations?

De façon analogue, les dossiers sur les questions habituelles de sécurité minière sont généralement positifs : ils indiquent que les exploitants des mines et les organes de réglementation ont pu offrir aux travailleurs une protection adéquate dans les mines d'uranium de la Saskatchewan. Cependant, aucune résolution ne précise à quelle sphère de compétence incombe la responsabilité en matière de santé et de sécurité au travail. Le gouvernement provincial surveille de près la sécurité des travailleurs en Saskatchewan, mais les autorités fédérales conservent le droit d'engager des poursuites pour garantir le respect des lois.

La commission presse les gouvernements de modifier sans tarder leurs lois en fonction des nouvelles normes internationales de protection contre les radiations, d'accélérer la mise à jour des Mines Regulations et de régler le conflit de compétence au sujet de la responsabilité administrative des questions habituelles de santé et de sécurité dans les mines d'uranium.

4.2 Études épidémiologiques

On peut évaluer les effets d'une certaine industrie sur la santé et la sécurité en comparant au niveau statistique les événements liés à la santé des travailleurs et les événements qui touchent la santé de la population en général. Dans le passé, des études épidémiologiques ont souvent été menées pour évaluer les risques professionnels et pour trouver des moyens d'améliorer la sécurité en milieu de travail.

Les travailleurs des mines d'uranium de la Saskatchewan sont exposés au produit de filiation du radon, de même qu'à un certain nombre de métaux lourds tels l'arsenic et le nickel, qu'on sait cancérogènes. Il se peut donc qu'un effet de synergie s'exerce sur les taux de cancers pulmonaires causés par de nombreuses expositions. Pour cette raison, nous avons recommandé, dans un rapport publié en 1993, qu'on prenne les dispositions nécessaires pour réaliser une étude épidémiologique permanente auprès de l'ensemble des mineurs de la Saskatchewan (anciens, actuels et futurs). [D.G. Lee, J.F. Archibald, J. Dantouze, R. Neal and A. Yassi, Dominique-Janine Extension, McClean Lake Project et Midwest Joint Venture, Approvisionnements et Services Canada, octobre 1993, p. 20. ]

Pour donner suite à cette recommandation, la Commission de contrôle de l'énergie atomique (CCEA) a mis sur pied, avec la collaboration des sociétés minières et de la province, une équipe multidisciplinaire chargée d'élaborer un projet d'étude et d'effectuer l'étude. [D. Baris, A Cohort Mortality Study of Saskatchewan Uranium Miners, Commission de contrôle de l'énergie atomique, Submission to Midwest Public Hearings, Saskatoon, Saskatchewan, 28 mai 1996.] Composée d'épidémiologistes, de statisticiens, d'hygiénistes industriels et de cliniciens qui proviennent des organismes participants, cette équipe propose de réaliser l'étude auprès d'environ 5 000 travailleurs de mines d'uranium en Saskatchewan, employés entre 1975 et 2010 dans les mines des lacs Cluff, Key, Rabbit et McClean, de la rivière McArthur ainsi que dans d'autres mines dont l'exploitation sera approuvée par la suite.

Le projet se déroulera en deux étapes. D'abord, l'équipe du projet comparera les taux de mortalité des mineurs au taux de mortalité d'une population-type en Saskatchewan. Ensuite, une fois que les données recueillies précédemment auront fait l'objet d'une analyse statistique convenable, l'équipe entreprendra une étude de cohorte pour examiner plus à fond le nombre de cancers pulmonaires et toutes autres causes de décès auxquelles on croit que des risques excédentaires sont associés.

Cette étude épidémiologique permettra de dégager des données concrètes qui serviront à évaluer les effets des mines d'uranium sur la santé des travailleurs. Elle permettra également de déterminer si les mesures de protection existantes sont suffisantes ou si des améliorations doivent être apportées dans certains secteurs. Sans ces renseignements, il ne saurait être question de prendre des décisions éclairées à l'égard de l'augmentation possible des niveaux de protection.

Cette étude, qui résulte du processus d'examen, peut avoir de l'importance pour la protection des mineurs. Nous devons donc féliciter les personnes qui en sont à l'origine et recommander le maintien de l'aide financière nécessaire pour mener à bien cette étude.

4.3 Vitalité de la collectivité et santé communautaires

La vitalité de la collectivité se définit comme le bien-être social et la qualité de vie des membres de la collectivité. Elle est aussi intimement liée à la santé de la collectivité, car on sait que des facteurs comme l'emploi, le revenu, l'éducation, le logement, l'environnement et les modes de vie personnels ont une influence sur l'état de santé.

L'industrie minière de l'uranium continuera d'exercer une influence non négligeable sur la vitalité de la collectivité et la santé communautaires dans le nord de la Saskatchewan parce qu'elle représente une importante source d'emplois et parce qu'elle contribue à l'aménagement de voies de transport routier et aérien, ainsi qu'au développement du réseau électrique dans cette région. Ses activités risquent malheureusement de contaminer de grandes étendues de territoire et de vicier l'air, l'eau et les aliments provenant de la région, dont dépendent de nombreux habitants. De plus, il y a les sentiments collectif d'injustice et de colère que suscite l'extraction, sur les territoires ancestraux, de ressources valant des milliards de dollars, quand de nombreux habitants luttent pour satisfaire leurs besoins de base. Le sentiment collectif d'injustice est ce qui pousse en partie les collectivités nordiques à vouloir une certaine forme de partage des revenus.

Il est clair que l'extraction de l'uranium peut avoir des effets positifs et des effets négatifs sur les collectivités nordiques. Il est nécessaire d'établir une série d'indicateurs pouvant servir à l'évaluation plus exacte des répercussions de l'extraction minière sur la qualité de vie des habitants du Nord. Nous devons des éloges à Cameco Corporation qui a décidé d'offrir chaque année un montant de 250 000 dollars couvrant les services d'un spécialiste des sciences sociales dans le Nord et la création d'une base de données concernant les effets des activités minières sur la situation socio-économique et sur la santé des collectivités du Nord. Nous nous réjouissons également de constater que la province s'est engagée à faciliter les discussions entre les représentants du secteur de l'exploitation de l'uranium, les comités de la qualité de l'environnement et les nouveaux conseils de la santé du Nord, afin qu'ils puissent déterminer clairement les principaux indices qui composeront les bases de données et d'autres secteurs de surveillance. [The Government's Position on Proposed Uranium Mining Developments in Northern Saskatchewan, McArthur River Project, gouvernement de la Saskatchewan, mai 1997, p. 22.]

La commission constate que l'industrie en général prend des mesures pour vraiment connaître l'opinion des habitants du Nord sur les questions qui touchent la vitalité de la collectivité. L'industrie communique avec les représentants des six collectivités d'Athabasca par l'entremise du Groupe de travail de l'Athabasca et tente ainsi d'établir, entre les gens de la région et les sociétés minières, un consensus à l'égard du déroulement des activités minières dans le Nord. Les sociétés minières se sont engagées à maintenir, en principe et en espèces, l'appui qu'elles offrent aux trois comités de la qualité de l'environnement; elles continueront donc d'offrir des services de transport, d'hébergement et d'information aux fins des visites sur les chantiers miniers et continueront de prêter une oreille attentive aux préoccupations des comités. [Par exemple, J. Tosney, président, Cigar Lake Mining Corporation, Transcript of Supplementary Public Hearings for Midwest and Cigar Lake, La Ronge, Saskatchewan, 27 août 1997. p. 142. ]

De nombreux indices montrent que l'industrie tient compte des préoccupations des habitants du Nord. La proportion de ces habitants qui font partie de la population active ne cesse d'augmenter; les modalités d'appel d'offres sont maintenant telles que les entreprises du Nord ont beaucoup plus de possibilités qu'avant; des mesures d'encouragement visent à inciter les jeunes à poursuivre leurs études pour améliorer leurs qualifications; une aide financière et opérationnelle est offerte pour la mise en œuvre de programmes de formation préalable à l'emploi dans le cadre du Plan de formation multilatéral; enfin, des possibilités d'éducation et de formation sont offertes aux employés. Cette liste est loin d'être complète, mais elle montre que les sociétés d'exploitation minières d'uranium font des efforts pour assumer leurs responsabilités sociales dans le Nord.

Il est encourageant de constater que les gouvernements fédéral et provincial ont entrepris récemment des projets visant à surveiller différents aspects de la santé communautaire, y compris les impacts cumulatifs et la contamination possible des aliments provenant de la région; indiquons à cet effet la réalisation d'une enquête de base sur l'état de santé des collectivités et la réalisation d'une étude sur la santé des travailleurs des mines d'uranium. Ces initiatives devraient enrichir le processus général de planification de la santé dans le nord de la Saskatchewan. Les gouvernements fédéral et provincial ont contribué au financement du Plan de formation multilatéral et ont dernièrement entamé avec les dirigeants du Nord des pourparlers sur les questions de délestage, de taxation, d'autonomie gouvernementale, de financement et de partage des revenus. Cette dernière initiative prendra probablement beaucoup de temps, mais elle pourrait modifier en profondeur la façon dont bon nombre d'habitants du Nord perçoivent l'exploitation des gîtes d'uranium, surtout si les pourparlers aboutissent à un plus grand partage des retombées.

Il est nécessaire de clore plus sobrement notre exposé sur la vitalité communautaire. Les habitants du Nord nourrissent des attentes extrêmement élevées à l'égard de l'industrie minière de l'uranium. Beaucoup d'entre eux y voient la planche de salut économique de leur région. Il reste que le taux de croissance de la population du Nord est considérablement élevé, d'où la difficulté d'assurer des niveaux d'emploi suffisants aux diplômés toujours plus nombreux. Il ne sera pas possible, ni souhaitable, que l'industrie minière de l'uranium règle tous les problèmes économiques du Nord. Il est nécessaire de diversifier la base économique du Nord pour réduire la dépendance de la population à l'égard d'une seule industrie.

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5.0 Effets socio-économiques

L'exploitation des gîtes d'uranium entraîne un cycle économique d'expansion et de ralentissement. Malgré la richesse du minerai dans le nord de la Saskatchewan et une forte demande du marché pour le concentré d'uranium, les corps minéralisés actuellement en développement seront appauvris d'ici une quarantaine d'années et pourraient être ou non remplacés par d'autres découvertes. Les emplois et les entreprises qui seront générés par l'exploitation des mines et des usines ne dureront pas toujours. Toutefois, les avantages intangibles de la formation et de l'expérience acquises grâce à ces débouchés constituent des impacts cumulatifs durables puisqu'elles fournissent l'assise d'une base d'emploi stable et d'une intégration initiale à l'économie salariale.

L'emploi, les possibilités d'affaires, l'éducation et la formation sont des activités intimement liées les unes aux autres et extrêmement interdépendantes. Les emplois et les possibilités d'affaires sont accessibles seulement à ceux qui possèdent des compétences acquises grâce à l'éducation et à l'expérience; les gens ne sont motivés à acquérir l'éducation et la formation que s'ils ont des possibilités raisonnables de pouvoir obtenir des emplois ou des contrats.

5.1 Éducation et formation

La participation des habitants du Nord à la population active, et en particulier dans les catégories d'emplois bien rémunérés, est tributaire du niveau d'éducation et de formation des personnes recherchant activement un emploi. La multiplication des emplois offerts grâce aux projets d'exploitation des mines d'uranium pourrait inciter les résidents à acquérir l'éducation et la formation requises pour joindre les rangs des effectifs de l'activité minière.

Traditionnellement, les populations du Nord affichent un retard par rapport au reste de la province en matière de qualifications et de compétences. Dans le cadre du Recensement de 1986, on a recueilli des données sur le niveau d'éducation seulement dans deux localités du bassin de l'Athabasca, soit Wollaston Lake et Fond-du-Lac. Sur une population active potentielle de 530 personnes résidant dans ces deux localités, les trois quarts étaient analphabètes, c'est-à-dire que leur niveau d'éducation ne dépassait pas la 9e année. Seulement cinq personnes (ou moins de 1 p. 100) avaient obtenu un certificat de 12e année. Les données recueillies pour l'ensemble de la province ont indiqué que 19 p. 100 seulement des membres de la population active étaient analphabètes et que 48 p. 100 avaient complété leur 12e année ou davantage. [Interim Report, Saskatchewan Environment and Resource Management, mai 1993, section 2, p. 56.]

Des données plus récentes montrent une amélioration encourageante à cet égard, attribuable à plusieurs facteurs. Un de ces facteurs est l'ouverture de nouvelles écoles et l'extension, dans les écoles existantes, des programmes scolaires au-delà de la 9e année, ce qui permet aux étudiants de poursuivre leurs études tout en demeurant dans leur collectivité. L'introduction de cours de rattrapage scolaire pour les adultes, le programme de formation multilatéral, le programme de préparation à l'emploi de l'Athabasca, mis en œuvre par le NORTEP, ont peu à peu contribué à relever le niveau d'éducation de la population active et à préparer les travailleurs et travailleuses à occuper des emplois valables. Il ne faudrait pas hésiter à poursuivre et à améliorer ces initiatives car, autrement, on risquerait d'enlever aux résidents du nord de la Saskatchewan la possibilité de participer pleinement à l'édification du Canada de demain.

5.2 Emploi

Dans les dix années ayant précédé la mise sur pied de la commission en 1991, les listes de paye des compagnies minières d'uranium comptaient entre 584 et 1 049 personnes chaque année; parmi ces salariés, la proportion de résidents du Nord étaient raisonnable, s'établissant entre un minimum de 201 personnes et un maximum de 336 personnes. Exprimé en pourcentage de la population active, le taux de participation des résidents du Nord s'établissait entre 31,2 et 39,9 p. 100 durant la période de dix ans comprise entre 1981 et 1991. En outre, les sites d'exploitation employaient de 150 à 330 personnes à contrat. [Interim Report, Saskatchewan Environment and Resource Management, mai 1993, tableau 1.4.7.]

Au cours des 20 prochaines années, le nombre de travailleurs embauchés par les compagnies variera au fur et à mesure que certains dépôts seront exploités et qu'on entreprendra le cycle de production à d'autres gisements. En raison de la nature complémentaire de plusieurs projets, les effectifs des usines des lacs Key et McClean demeureront relativement stables. L'embauchage atteindra un sommet de plus de 1 600 employés dans les diverses entreprises en l'an 2003, mais décroîtra avec l'épuisement des réserves des lacs Key et Rabbit. Le nombre d'employés à contrat atteindra un sommet durant les phases de construction (1997-1999) puis se résorbera durant la phase de production.

Sur le plan des impacts cumulatifs, le taux de participation des résidents du Nord aux effectifs sera proportionnel au nombre total d'emplois offerts. Ces dernières années, le taux de participation a connu une augmentation constante, passant de 31,2 p. 100 en 1985 à plus de 50 p. 100 en 1997. Si les promoteurs satisfont aux conditions recommandées en matière de ressources humaines dans les baux de surface des projets de McArthur River, Midwest et Cigar Lake, le taux de participation des résidents du Nord enregistrera une augmentation annuelle d'environ 1 p. 100 et atteindra au moins 67 p. 100.

La qualité des emplois offerts aux résidents du Nord s'est également quelque peu améliorée. En 1992,

... les résidents du Nord occupaient surtout des emplois de manoeuvres, d'ouvriers d'usine et d'opérateurs de machinerie lourde. Ils constituaient une très faible proportion de l'effectif total dans les emplois comportant une rémunération plus élevée - les métiers, les services techniques et les postes de supervision. [E. Weick, ESAS, A Socio-Economic Overview of Uranium Mining In Northern Saskatchewan, octobre 1992, pp. 50-51.]

En octobre 1996, la situation montrait des signes de changement :

... 40 p. 100 de tous les emplois dans les services techniques, 29 p. 100 de tous les emplois dans les métiers et 80 p. 100 de tous les emplois dans les usines et les opérations de machinerie lourde sont maintenant occupés par des résidents du Nord... grâce en bonne partie au Plan de formation multilatéral établi en décembre 1993. [Northerners reap benefits of Multi-Party Training Plan, communiqué de presse, ministère des Affaires du Nord, 7 octobre 1996, p. 1.]

Il est également encourageant de constater les efforts déployés pour tenir compte des particularités culturelles de la région, comme en témoigne éloquemment l'embauche par les promoteurs d'un autochtone comme conseiller en emploi.

Plusieurs de ces améliorations sont attribuables aux objectifs cibles d'emploi que les promoteurs ont endossés en signant les baux de surface. De nombreux intervenants ont fait état du bien-fondé de ces objectifs cibles sur les pratiques d'embauche. Par conséquent, les gouvernements devraient continuer à fixer aux promoteurs des objectifs réalistes, mais stimulants, en ce qui concerne l'emploi des habitants du Nord.

5.3 Possibilités d'affaires

Pour les habitants du Nord, les premières possibilités d'affaires avaient généralement trait à des activités n'exigeant qu'une mise de fonds minimale et une expertise technique limitée (services de sécurité, restauration et travaux de construction sommaires). Plus tard, sont apparues des entreprises dans des domaines tels que la construction lourde et les activités liées au transport : transport aller-retour des employés pour les rotations hebdomadaires (sept jours de travail - sept jours de congés), distribution de carburant ou d'approvisionnements, transport du minerai jusqu'à l'usine et livraison du concentré d'uranium aux clients.

Le stade ultime de la participation des habitants du Nord à l'industrie minière sera atteint lorsque des résidents auront acquis l'éducation et l'expérience nécessaires pour entreprendre des travaux d'ingénierie et de recherche scientifique. Selon notre estimation la plus optimiste, cette possibilité ne se réalisera pas avant longtemps.

En 1989, une bonne partie des achats de biens et de services se faisaient à La Ronge, qui est une importante plaque tournante du transport dans le nord de la Saskatchewan, ainsi qu'un centre d'approvisionnement en carburant, en équipement, en bois d'oeuvre et en explosifs. Par conséquent, les possibilités d'affaires dans le nord de la Saskatchewan étaient concentrées dans une très petite zone dans le sud géographique de la région, et n'étaient pas réparties de façon égale.

Récemment, l'adhésion plus grande de l'industrie à la formule de la coentreprise s'est traduite par la conclusion de marchés de fourniture de biens et de services dans d'autres régions du nord de la Saskatchewan. On peut en citer des exemples dans les secteurs de la restauration (coentreprise de Beauval et de Domco au lac McClean [The Midwest Project Environmental Impact Statement, Supplementary Information, Cogema Resources Inc., mai 1996, pp. 2 - 14.] ) et de la construction (coentreprise de Snake Lake Construction de Pinehouse et de Tron Power de Saskatoon [R. Rediron, Transcript of McArthur River Public Hearings, Saskatoon, Saskatchewan, 11 septembre 1996, p. 185.] ). L'expérience acquise grâce aux coentreprises a permis à certains entrepreneurs du Nord de décrocher leurs propres contrats. Éventuellement, cela deviendra la norme pour plusieurs des contrats accordés.

Les résidents du Nord ont enregistré des gains importants au chapitre des occasions d'affaires depuis 1989. Cette année-là, l'exploitation des mines d'uranium se traduisait par des dépenses de l'ordre de 23 millions de dollars dans le nord de la Saskatchewan. Ce montant représentait environ 16 p. 100 des dépenses d'exploitation des mines. La plus grande partie de ces dépenses était consacrée aux services de transport. [A Socio-Economic Overview of Uranium Mining in Northern Saskatchewan, E. Weick, ESAS, octobre 1992, p. iv.] Dans le cas des projets récents d'exploitation de l'uranium, on prévoit acheter au moins 35 p. 100 des biens et services auprès d'entreprises du Nord. Même s'il est tentant de considérer ce gain dans les contrats attribués aux entrepreneurs du Nord comme un impact cumulatif de l'exploitation de l'uranium, il faut préciser que cette augmentation des possibilités d'affaires n'aura pas nécessairement un impact durable sur l'économie régionale. Certaines entreprises dont la viabilité repose essentiellement sur les importants contrats que leur procure le secteur de l'exploitation de l'uranium, ne seront en activité que dans la période où les mines seront exploitées. Ce qui restera cependant, ce sont les compétences et l'expérience acquises grâce à ces contrats.

5.4 Participation locale

Une bonne partie des habitants du nord de la Saskatchewan sont des descendants de peuples autochtones établis dans cette région du Canada depuis des siècles. Pour cette raison, ils considèrent le nord de la Saskatchewan comme leur pays d'appartenance, un lieu auquel ils sont rattachés à la fois de façon historique et spirituelle. Il se pourrait très bien, par conséquent, que ces habitants soient atterrés lorsque surviendront chez eux des changements provoqués par des forces extérieures, surtout s'ils ne savent pas exactement quelles seront les incidences de ces changements sur eux-mêmes et sur les générations futures. Ils ont le droit d'être informés sur les projets qui se préparent et de participer au processus de planification.

Les populations locales et les promoteurs venant de l'extérieur doivent mettre au point des moyens leur permettant de communiquer efficacement : les uns et les autres ont beaucoup à retirer du dialogue. Il est donc important de donner aux populations locales l'occasion d'exprimer leurs aspirations et leurs préoccupations concernant les projets à l'étude. Les exploitants miniers et les organismes gouvernementaux de réglementation ont la responsabilité de prendre sérieusement en considération les attentes des populations locales dans l'élaboration des projets. Il est essentiel que les promoteurs de projets de développement dans le nord de la Saskatchewan trouvent des moyens pour favoriser la participation des populations locales et mettre à contribution leurs connaissances dans la planification et l'élaboration de leurs projets.

Les comités de la qualité de l'environnement et le Groupe de travail de l'Athabasca sont, à l'heure actuelle, les meilleurs véhicules pour l'échange d'information et la mise en commun des idées. Il y va de l'intérêt de toutes les parties d'appuyer ces organisations et de faire en sorte que leur participation devienne partie intégrante du processus de planification et de réglementation.

5.5 Comités de la qualité de l'environnement

En réponse à une recommandation contenue dans notre rapport de 1993, le gouvernement de la Saskatchewan a établi trois comités de la qualité de l'environnement (CQE) en 1995. Ä peu près au même moment, a été mis sur pied le Secrétariat de contrôle des mines du nord de la Saskatchewan (SCMNS) et un bureau a été ouvert à La Ronge. [The Government's Position on Proposed Uranium Mining Developments in Northern Saskatchewan, gouvernement de la Saskatchewan, décembre 1993.] Le Secrétariat a notamment pour mandat de fournir un soutien aux comités de la qualité de l'environnement, y compris la préparation de documents éducatifs expliquant aux habitants du Nord les raisons de la surveillance et la façon dont elle est exercée, ainsi que l'utilisation de l'information.

Les membres des trois comités de la qualité de l'environnement sont représentatifs des localités réparties dans trois régions géographiques du nord de la Saskatchewan. Le comité de la qualité de l'environnement de West Side regroupe des membres représentant des collectivités touchées, mentionnées dans l'Accord sur le perfectionnement des ressources humaines du lac Cluff (Beauval, Première nation de Birch Narrows, Buffalo Narrows, Première nation de Buffalo River, Première nation de Canoe Lake, Nation dénée de Clearwater, Cole Bay, Première nation d'English River, Green Lake, Île-à-la-Crosse, Jans Bay, La Loche, Michel Village, Patuanak et St. George's Hill). Les membres du comité de la qualité de l'environnement de South Central représentent les collectivités identifiées dans les accords du lac Key et de la rivière McArthur sur le perfectionnement des ressources humaines (Air Ronge, Beauval, Brabant Lake, Buffalo Narrows, Première nation d'English River, Cumberland House, Première nation de Cumberland House, Denare Beach, Green Lake, Île-à-la-Crosse, La Loche, La Ronge, bande indienne de Lac La Ronge, Première nation de Montreal Lake, Patuanak, Pelican Narrows, Nation crie de Peter Ballantyne, Pinehouse, Sandy Bay, Southend, Stanley Mission et Weyakwin). Le comité de la qualité de l'environnement d'Athabasca réunit des représentants des collectivités des lacs Rabbit, McClean et Cigar ainsi que du projet Midwest (Nation denesuline de Black Lake, Camsell Portage, Nation denesuline de Fond-du-Lac, Stony Rapids, Uranium City et Première nation de Hatchet Lake).

Une publication récente décrit ainsi le rôle des comités de la qualité de l'environnement :

Les comités de la qualité de l'environnement offrent un forum qui permet d'acheminer aux collectivités l'information provenant du gouvernement et des exploitants miniers, et qui permet aux collectivités de transmettre leurs commentaires concernant les projets d'exploitation de l'uranium. Il s'agit d'un mécanisme assurant que l'on tienne compte des préoccupations et des recommandations des habitants du nord concernant les moyens déployés pour exploiter les gisements d'uranium dans le nord de la Saskatchewan. Leurs suggestions et leurs recommandations sont transmises aux exploitants miniers et aux gouvernements. Ainsi, les comités de la qualité environnementale influencent les modalités de réalisation des projets. Le pouvoir de réglementation à l'égard de l'industrie, de son développement et de ses activités relève de la responsabilité du gouvernement. [Environmental Quality Committees and Northern Mines Monitoring Secretariat Report to Communities 1996/97, ministère des Affaires du Nord de la Saskatchewan, août 1997, p. 3.]

Jusqu'à présent, il semble que les deux principales activités des comités de la qualité de l'environnement aient surtout porté, d'une part, sur la nécessité de bien informer leurs membres sur le secteur de l'exploitation de l'uranium dans le nord de la Saskatchewan et, d'autre part, sur le désir de ces représentants de partager à leur tour ces informations avec les membres de leur collectivité respective.

D'après leur récente publication, [Ibid., p. 4.] les comités n'ont pas chômé depuis qu'ils ont été formés. Grâce à la collaboration de la directrice du SCMNS, Pam Schwann, ils ont eu l'occasion de participer à un grand nombre d'activités :

  • revue des documents pour le renouvellement du permis d'exploitation de Cluff Lake;
  • examen des études d'impact environnemental pour les projets de Midwest, McArthur River et Cigar Lake;
  • examen des plans provisoires de désaffectation des mines de Midwest, Rabbit Lake, Key Lake et Cluff Lake;
  • revue de la politique fédérale concernant la compensation de l'habitat du poisson;
  • examen des baux de surface types et des accords types sur le perfectionnement des ressources humaines;
  • revue du Programme de contrôle des effets cumulatifs;
  • visite de six sites miniers;
  • présentation de mémoires aux audiences publiques sur les projets de Midwest, McArthur River and Cigar Lake;
  • présentation de mémoires à la Commission de contrôle de l'énergie atomique;
  • élaboration d'un projet de plan de compensation de l'habitat du poisson pour le Projet de McClean Lake;
  • participation au Caribou Sampling Project dans la région du lac Wollaston;
  • élaboration d'une recommandation pour l'examen du site abandonné de la mine Nisto dans la région du lac Black et mise en oeuvre d'activités de désaffectation;
  • participation à un colloque organisé par la Canadian Aboriginal Minerals Association;
  • visite des laboratoires du Conseil de recherche de la Saskatchewan, où sont effectuées des analyses sur des échantillons d'air, d'eau, de poisson et de faune sauvage.

Outre les échanges informels d'information entre les membres des comités et les collectivités, les comités de la qualité de l'environnement s'efforcent de tenir les résidents du Nord informés en distribuant aux conseils de bande et aux conseils municipaux des copies des procès-verbaux et des comptes rendus de leurs activités. Le SCMNS aide les comités de la qualité de l'environnement à favoriser l'échange d'information avec la population en préparant des articles éducatifs qui sont publiés dans Opportunity North , bimensuel qui est distribué dans tous les foyers du nord de la Saskatchewan. À titre d'exemple, une des récentes éditions donnait un excellent résumé des technologies d'élimination des déchets miniers. [Opportunity North, volume 4, numéro 3, 1997.]

À notre avis, les comités de la qualité de l'environnement jouent un rôle essentiel en ce qui concerne le secteur de l'exploitation des mines d'uranium dans le nord de la Saskatchewan. Grâce à eux, les habitants du Nord ont une meilleure connaissance de ce secteur et des impacts positifs et négatifs qu'il peut avoir sur les populations et sur l'environnement du nord de la Saskatchewan.

Nous estimons que la mise sur pied des comités de la qualité de l'environnement constitue l'une des contributions les plus durables découlant de notre travail. Nous sommes convaincus que la meilleure façon d'assurer la protection de l'environnement dans cette région consiste à donner la possibilité aux habitants du Nord de mieux connaître ce secteur et de participer directement à son développement.

Nous félicitons le gouvernement de la Saskatchewan pour la prévoyance dont il a fait preuve en formant ces comités et nous recommandons fortement que les gouvernements fédéral et provincial, de même que les sociétés minières, continuent de les appuyer dans leur travail. Les gouvernements doivent assurer que ces comités disposent des fonds nécessaires pour remplir leur mandat et les compagnies minières, quant à elles, devraient toujours rechercher les meilleurs moyens pour leur fournir, d'une manière précise et accessible, tous les renseignements dont ils ont besoin.

5.6 Partage des recettes

Lors des réunions visant à déterminer l'importance des problèmes et des priorités, tenues en 1992, la commission a été mise au courant des attentes des habitants du Nord concernant les recettes générées par l'exploitation des mines d'uranium. [L. Wolfe, Summary Report on Scoping Meetings for Cigar Lake and McArthur River Projects, 1992, pp. 44 - 45.] Le désir des habitants du Nord de voir l'établissement d'un programme de partage des recettes est devenu un sujet récurrent à chaque fois que nous nous sommes rendus dans les collectivités, de sorte que nous avons formulé des recommandations en faveur de cette idée dans chacun de nos rapports.

Rétrospectivement, il semblerait que cette préoccupation à l'égard du partage des recettes soit en bonne partie attribuable au fait que l'on n'a pas répondu aux attentes qu'avait suscitées le rapport sur le projet de Cluff Lake en 1978. [E.D. Bayda, K. McCallum et A. Groome, Final Report Cluff Lake Board of Inquiry, mai 1978, pp. 187 - 194.] Les recommandations du rapport à l'effet que le gouvernement provincial institue un cadre de partage des redevances sur l'extraction de l'uranium, en vertu duquel le gouvernement verserait une portion de ces redevances à certains corps administratifs du Nord » ne furent jamais mises à exécution, au grand dam de nombreux résidents du Nord.

Dans notre rapport de 1993, nous recommandions qu'« aucun nouveau projet d'aménagement de mine d'uranium ne soit entrepris tant qu'une formule de partage des revenus, acceptable pour la majorité des collectivités touchées, n'a pas été adoptée ». [D.G. Lee, J.F. Archibald, J. Dantouze, R. Neal et A. Yassi, Dominique-Janine Extension, McClean Lake Project et Midwest Joint Venture, Approvisionnements et Services Canada, octobre 1993.] Pour donner suite à cette recommandation, le gouvernement provincial a mis en oeuvre bon nombre d'initiatives, à savoir l'engagement d'assumer une partie des coûts du Plan de formation multilatéral; l'adoption de modifications au Northern Revenue Sharing Trust Account pour donner aux habitants du Nord un rôle plus important dans l'établissement des priorités quant à l'utilisation de ce fonds; la création d'un fonds de développement du Nord pour épauler le développement des activités commerciales dans le Nord; la mise sur pied d'un Secrétariat de contrôle des mines du Nord pour fournir au public des renseignements précis et dignes de foi concernant les projets miniers; la mise en oeuvre d'un programme intégré de surveillance des impacts cumulatifs, des travaux d'amélioration à la route reliant La Ronge et Points North Landing; la mise sur pied de comités de la qualité de l'environnement pour chaque groupe de collectivités touchées afin d'améliorer la diffusion de l'information concernant les projets miniers [The Government's Position on Proposed Uranium Mining Developments in Northern Saskatchewan, gouvernement de la Saskatchewan, décembre 1993.] . Cependant, lorsque nous sommes retournés dans les collectivités pour la tenue des audiences publiques sur le Projet de Midwest au printemps de 1996, il était évident que la plupart des gens ne voyaient pas ces mesures comme une forme de partage des recettes, peut-être en raison du fait qu'ils n'avaient pas participé directement à l'élaboration de ces programmes. Puisqu'ils jugeaient que les gouvernements n'avaient pas tenu leurs engagements d'une façon satisfaisante, la rancoeur éprouvée s'amplifia et fut, selon nous, la raison principale du boycott des audiences de 1996 sur les projets de McArthur River et de Cigar Lake, par certaines collectivités.

Suite à la publication du rapport sur le Projet de McArthur River, [D.G. Lee, J.F. Archibald et R. Neal, Projet de mine d'uranium de McArthur River, Travaux publics et Services gouvernementaux Canada, février 1997.] le premier ministre de la Saskatchewan et six membres de son cabinet répondirent à l'une des recommandations de ce rapport en tenant une rencontre avec les dirigeants des collectivités du Nord, le 12 mai 1997 à Saskatoon. On y aborda, entre autres sujets, la question du partage des recettes et il fut annoncé qu'on s'était entendu pour tenir une autre réunion du même genre. [Government and northern leaders meet to discuss northern issues, communiqué de presse, Conseil exécutif, gouvernement de la Saskatchewan, 12 mai 1997.] Plus tard, le gouvernement provincial annonçait qu'il engageait des discussions avec les dirigeants du Nord en vue d'élaborer une stratégie de développement du Nord qui soit pleinement conforme aux priorités économiques et sociales des populations du Nord ». [T. Penikett, Submission of the Government of Saskatchewan to the Federal-Provincial Review Panel on Proposed Cigar Lake and Midwest Uranium Mine Developments, La Ronge, Saskatchewan, 28 août 1997, pp. 2 - 4.] Au même moment, on apprit que le ministre provincial des Affaires intergouvernementales et des Affaires autochtones, le ministre fédéral des Affaires indiennes et du Nord canadien et le chef de la Federation of Saskatchewan Indian Nations avait signé un accord financier tripartite ayant pour but de «négocier des arrangements fiscaux sur plusieurs questions financières connexes, y compris le transfert de responsabilités, la fiscalité, le financement de l'autonomie gouvernementale et le partage des recettes. [Ibid., p. 4.]

Nous sommes conscients qu'on ne trouvera pas du jour au lendemain des solutions répondant aux préoccupations des habitants du Nord concernant le partage des recettes et d'autres questions connexes. Car il est à prévoir que, quelles que soient les décisions qui seront prises à ce sujet, elles auront sans doute d'importantes répercussions ailleurs que dans le nord de la Saskatchewan. Il faut signaler que des discussions semblables ont lieu aussi dans d'autres provinces, [The Globe and Mail, Quebec agrees to negotiate with Crees, 13 juin 1997.] ce qui rend l'uniformité des approches d'autant plus nécessaires d'une province à une autre. Par ailleurs, il faut également agir en temps opportun en cette matière avant que tout l'uranium n'ait été exploité, traité et vendu.

La commission estime qu'elle n'a plus à tenter d'attirer l'attention des gouvernements sur cette question maintenant que ceux-ci ont entamé des discussions à ce sujet avec les dirigeants des collectivités du Nord. À plusieurs égards, il s'agit avant tout d'un problème de nature politique n'ayant qu'un rapport indirect avec l'évaluation environnementale. Nous nous réjouissons, par conséquent, qu'on tente actuellement de régler la question au niveau politique. Nous ne pouvons guère faire davantage pour aider les habitants du Nord dans les efforts qu'ils déploient pour profiter des richesses d'une région qu'ils considèrent depuis des générations comme leur terre d'appartenance.

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6.0 Autres questions

Les observations qui précèdent portaient directement sur des aspects de notre mandat, comme les questions environnementales et socio-économiques, la sécurité et la santé. Les examens ont toutefois soulevé un certain nombre de questions importantes qui ne s'intègrent pas vraiment à l'une ou l'autre des sections qui précèdent. Nous avons essayé d'en résumer quelques-unes dans la présente section.

6.1 Réglementation de l'industrie

Les organes de réglementation ont besoin du soutien de l'industrie et du public pour être efficaces. L'industrie souhaite la suppression des doubles emplois que font les organismes fédéraux et provinciaux de réglementation et elle demande la rationalisation du processus. Le public veut être certain que ces projets peuvent être exécutés en toute sécurité, sans effets néfastes pour l'environnement.

Si le public manifeste un degré satisfaisant de confiance à l'égard de la réglementation provinciale qui régit les mesures habituelles de santé et de sécurité, il a moins confiance en la réglementation fédérale qui vise les entreprises nucléaires. Cette méfiance découle en partie de l'appréhension souvent associée aux questions nucléaires. Il faut rehausser le degré de confiance du public de la Saskatchewan, en le renseignant sur les questions nucléaires et minières et en augmentant la participation des habitants du Nord aux activités de surveillance et de réglementation.

Bien que les membres du public aient exprimé à l'occasion un manque de confiance à l'égard du processus de réglementation, nous avons conclu, après avoir étudié soigneusement le système, que l'industrie a été bien réglementée dans la province de la Saskatchewan. Nous croyons que les travailleurs et le public ont été protégés sans que des exigences excessives ne soient imposées aux exploitants. Il semble toutefois possible de mieux définir les responsabilités entre les deux niveaux de gouvernement et, là où le double emploi est inévitable, d'améliorer la collaboration et l'efficience.

6.2 Viabilité de l'industrie

Le dommage environnemental causé par l'exploitation minière ne peut pas être justifié à moins que les projets génèrent des avantages compensatoires. Les avantages économiques de l'exploitation des mines dépendront directement du prix de l'uranium, qui sera régi pour sa part par les lois de l'offre et de la demande. L'examen environnemental doit par conséquent évaluer aussi la demande probable d'uranium à l'avenir.

Les évaluations des avantages économiques de l'exploitation des gisements d'uranium que les commissions d'enquête sur les projets Cluff Lake et Key Lake ont faites étaient effectivement trop optimistes. [E.D. Bayda, A.J. Groome, K.J. McCallum, Final Report, Cluff Lake Board of Inquiry, 1978, p. 165. R.W. Mitchell, D. Smyth, M.M. Tomilin, J.P. Roberts and W.N. Riese, Key Lake Board of Inquiry Report, 1981, pp. 21 - 22.] La promesse des prix élevés qui existaient à la fin des années 1970 et au début des années 1980 a encouragé une surproduction d'uranium qui a fait baisser les prix. En fait, une partie du stock excédentaire accumulé existe encore. Toutefois, comme la production mondiale courante répond seulement à environ la moitié de la demande à l'échelle du globe, les stocks excédentaires sont en train de diminuer rapidement et on prévoit que la demande d'uranium connaîtra une augmentation modeste au cours des deux prochaines décennies. Le prix est par conséquent également susceptible d'augmenter quelque peu au cours de la prochaine décennie.

Les témoignages de diverses sources présentés devant la commission convenaient que l'augmentation prévue de la demande d'uranium au cours de la prochaine décennie allait contribuer à rendre l'industrie rentable et à générer des bénéfices considérables pour les gouvernements fédéral et provinciaux. Par exemple, un rapport conjoint de l'Agence de l'OCDE pour l'énergie nucléaire et de l'Agence internationale de l'énergie atomique dit ce qui suit :

La consommation mondiale d'énergie électrique va continuer d'augmenter au cours des prochaines décennies afin de répondre aux besoins qui résulteront de l'augmentation de la population et de la croissance économique soutenue. Après le tournant du siècle, la demande d'électricité des pays en voie de développement augmentera vraisemblablement de deux à trois fois plus rapidement que celle des pays développés. On prévoit que la plupart des nouvelles installations nucléaires seront construites dans ces régions. De nombreux experts estiment qu'à l'échelle du globe, pour la période de 30 ans entre 1990 et 2020, la production d'électricité nucléaire (et les besoins correspondants en uranium) devrait connaître une croissance approximative de facteur deux. [URANIUM, 1993 Resources, Production and Demand», Agence de l'OCDE pour l'énergie nucléaire, Agence internationale de l'énergie atomique, Paris, 1994, p. 14.]

La Province a effectué en outre des examens indépendants de chacun des projets qui, comme chacun des rapports en fait état, prédisent des mouvements de trésorerie positifs et un bon taux de rendement de l'investissement. Tout indique donc actuellement que l'industrie sera rentable.

6.3 Non-prolifération nucléaire

Bien que le gouvernement du Canada interdise l'utilisation de l'uranium canadien dans les dispositifs nucléaires explosifs, il permet la vente d'uranium à des acheteurs étrangers conformément à sa politique de fongibilité qui, pour toute quantité d'uranium canadien vendue, impose l'obligation de rendre compte d'une quantité équivalente employée dans des applications non nucléaires. Il n'existe toutefois pas de processus permettant de distinguer l'uranium canadien de l'uranium acquis d'autres sources; la politique de fongibilité ne permet donc pas de garantir au public que l'uranium canadien ne sera pas utilisé dans des armes atomiques.

L'une des propositions visant à combler cette lacune prévoyait des mesures relatives à l'application internationale du concept de fongibilité, coordonnée avec les gouvernements des autres pays producteurs d'uranium, c'est-à-dire une politique de fongibilité internationale cumulative.

Il faut également tenir compte de la question de la vente continue d'uranium canadien à des pays qui viennent de tester des armes nucléaires ou qui ont enfreint autrement l'esprit des ententes internationales ratifiées, comme le Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires dont le Canada est signataire. Certains particuliers ont exprimé des réserves à l'égard du fait que des compagnies dans lesquelles les gouvernements de ces pays ont des intérêts participent à des activités continues d'exploitation de gisements d'uranium au Canada.

Un participant a proposé que le Canada réagisse à ces inquiétudes en révoquant le permis des compagnies appartenant à des gouvernements étrangers qui mettent à l'essai des armes nucléaires, ou en interdisant, pour une période de cinq ans, la vente d'uranium aux pays qui ont enfreint le Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires, [P. Prebble, Transcript of Public Hearings, Saskatoon, Saskatchewan, le 14 juin 1996, p. 145.] ou les deux. De telles mesures pourraient inciter fortement les gouvernements à respecter les ententes internationales dont le Canada est signataire.

6.4 Effets génétiques du rayonnement ionisant

Le public craint entre autres choses que l'augmentation du rayonnement ionisant, particulièrement en raison du rayonnement alpha émis par les particules ingérées par les organismes, suscite des problèmes génétiques dans le biote. Sans l'avoir indiqué explicitement, on semble craindre que l'augmentation du rayonnement ionisant puisse accroître le taux de mutation et accumuler des mutations dommageables dans le biote jusqu'à ce que les organismes ne soient plus viables. Ceci n'est pas une préoccupation mineure. Toutefois, se fondant sur la connaissance des effets génétiques de la radiation et sur l'étude de la génétique des populations, les scientifiques ont conclu que le risque était peu élevé.

Premièrement, il est reconnu que l'augmentation des radiations ionisantes donne lieu à une augmentation des taux de mutation des organismes; [Cet effet a été observé pour la première fois il y a environ 70 ans au cours des expériences de H.J Muller, utilisant des rayons X sur des mouches à fruits, et par L.J. Stadler, utilisant des rayons X sur de l'orge. Il est ressorti subséquemment que cela constituait une réaction générale des organismes.] il faut toutefois des doses importantes de radiation pour provoquer un changement notable des taux de mutation. Par exemple, chez les souris, il a été estimé que chaque dose additionnelle de 10 mSv produirait environ 1,5 x 10-7mutations de chaque locus du gène. [A.P. Mange and E.J. Mange, Genetics: Human Aspects, 2 nd Edition, Sinauer Associates, Sutherland, Massachusetts, 1990, p. 265.] Il faudrait une dose d'environ 1000 mSv pour doubler le taux normal de mutation de cette espèce. Pour les êtres humains, il a été estimé qu'une dose de radiation de 500 à 2500 mSv serait nécessaire pour doubler le taux naturel de mutation. [Ibid.] D'autres organismes réagissent peut-être de façon plus ou moins sensible au rayonnement ionisant, mais ils ont tous besoin de doses élevées de radiation pour modifier leurs taux de mutation de façon notable.

Deuxièmement, les mutations des organismes provoquées par le rayonnement ionisant ne sont pas différentes des mutations spontanées naturelles. Si certaines peuvent être profitables, la plupart seront soit neutres (c'est-à-dire en apparence ni meilleures ni pires que le gène original), soit nocives. Les mutations nouvelles, qu'elles soient spontanées ou provoquées par des agents mutagènes comme le rayonnement ionisant, se produisent à une fréquence très basse variant de 1 en 100 000 à 1 en 100 000 000 par gène, par génération. Ainsi, même en comptant des milliers de gènes par cellule germinale, chaque génération nouvelle subira très peu de mutations. On estime que chaque être humain porte environ deux nouvelles mutations; [F.J. Ayala and J.W. Valentine, Evolving: The Theory and Process of Organic Evolution, The Benjamin/Cummins Publishing Company, Menlo Park, California, 1979, p. 93.] la plupart des organismes autres que les humains portent beaucoup moins de mutations nouvelles parce qu'ils ont moins de gènes.

L'accroissement du taux de mutation aurait étonnamment peu d'effet sur la structure génétique de la population, parce que chaque nouvelle variation produite par mutation dans chaque génération ne constitue qu'une fraction infime de la quantité totale de variations génétiques déjà présente dans la population. La plupart des organismes subissent des milliers de mutations résultant de leur accumulation dans la population au cours de milliers de génération et les êtres humains ne font pas exception. On estime en général que chaque nouvelle variation produite par mutation qui s'ajoute dans la population à chacune des générations représente moins d'un millième de la variation existante dans cette population. [Ibid, p. 94.] En outre, la plupart des mutations nouvelles ne survivent pas dans la population parce qu'elles sont éliminées par sélection ou de façon aléatoire. Les scientifiques ont donc conclu que la pression exercée par les mutations a peu d'effet sur la structure génétique des populations. Les changements qui se produisent ont tendance à se dérouler lentement.

On peut en conclure que les risques posés par les effets génétiques découlant des augmentation du rayonnement ionisant en raison de l'exploitation des gisements d'uranium sont vraisemblablement petits ou négligeables. Les taux de mutation spontanée naturelle sont de fréquences très basses et il faut des doses élevées de radiation pour les modifier considérablement. Pour augmenter les taux de mutation jusqu'aux niveaux où ils pourraient changer énormément la structure génétique des populations, de façon dommageable, il faudrait des doses si élevées de rayonnement ionisant qu'elles nous feraient craindre davantage les effets mortels directs de la radiation que leurs effets génétiques.

6.5 Processus d'examen des évaluations environnementales

Le mandat de la cette commission lui a été conféré conjointement par les gouvernements fédéral et provincial en 1991. Nous avons effectué de façon indépendante des examens publics des évaluations environnementales de sept projets différents d'exploitation de gisements d'uranium. Les examens publics ont donné lieu à des précédents qui méritent d'être commentés.

Cet examen constituait le premier examen d'évaluation environnementale entrepris conjointement par les gouvernements du Canada et de la Saskatchewan. En utilisant un processus qui tenait compte des changements qu'il fallait apporter aux règlements et aux lois des deux gouvernements, nous avons pu éviter le double emploi et réduire les coûts et le temps requis.

Le mandat de la commission était le premier à englober la considération des impacts cumulatifs régionaux résultant de l'exploitation de divers projets dans la même région géographique au cours de la même période. La commission a examiné l'exploitation minière de neuf corps minéralisés, la construction d'une usine de concentration, la conception de deux installations de gestion des résidus et l'élargissement de l'infrastructure connexe de transport. Comme l'examen a duré longtemps, les membres de la commission ont été en mesure d'acquérir une connaissance approfondie des aspects techniques des projets, tout en assimilant le climat économique et social de la région visée. Cela est un aspect important puisqu'aucune exploitation ne se produit de façon isolée, ni sur le plan physique de l'environnement, ni au niveau des conditions socio- économiques. Le fait d'examiner plusieurs projets en vertu du même mandat nous a permis de tenir compte des incidences environnementales et socio-économiques cumulatives de tous les projets d'exploitation.

L'un des autres avantages du regroupement des sept propositions dans un seul processus d'examen provenait du fait qu'il permettait d'examiner des options destinées à réduire l'incidence globale des projets d'exploitation en combinant certains aspects de leurs activités. Un exemple éloquent est la décision de broyer (à forfait) le minerai de diverses mines dans quelques installations seulement, réduisant ainsi le nombre d'usines de concentration et d'installations de gestion des résidus à construire et à déclasser.

Le fait que la présente commission d'examen ait été réunie pour plus de six ans a présenté certaines difficultés. Le problème logistique du maintien de la participation des membres de la commission pour la durée du mandat est apparu quand deux des membres de la commission ont démissionné avant que tous les examens n'aient été menés à terme. Pour tous les membres, les responsabilités de la commission s'ajoutaient à celles de leur principal emploi, et les exigences de temps étaient souvent difficiles, sinon impossibles, à faire concorder. Il faudra vraisemblablement tenir compte de cet aspect advenant la création d'une autre commission chargée d'examiner un certain nombre de projets.

Un autre problème important tient du fait que le processus d'évaluation environnementale, qui se veut un outil de planification, examine le concept de chaque projet d'exploitation afin d'éviter que des mesures irrévocables ne soient prises avant que les décisions aient été établies. Dans le cas d'un examen conceptuel, le promoteur du projet doit choisir un moment donné où il existe suffisamment d'information pour établir une étude d'impact environnemental et pour fonder ses prédictions sur la quantité de renseignements disponibles à ce moment-là. Cela rend le processus d'évaluation environnementale statique. La tâche devient particulièrement compliquée lorsque l'étude d'impact environnemental d'un projet est fondé sur de l'information concernant un autre projet déjà approuvé qui génère de l'information propre au site à des fins d'autorisation de permis. Cela a été le cas des examens des projets Midwest et Cigar Lake, où la nature statique de l'évaluation environnementale de leur projet d'installation de gestion des résidus entrait en conflit avec la nature dynamique du processus d'obtention de permis en cours pour la même installation, soit l'installation JEB. Advenant que des examens semblables soient entrepris à nouveau, il faudra envisager de près la nécessité de composer avec l'interaction possible de l'information conceptuelle d'un projet et les données propres au site d'un autre projet.

Tout au long de l'examen, la commission et le secrétariat ont été saisis de certaines critiques à l'égard du processus d'examen public de l'évaluation environnementale. Certains se plaignaient de la durée des examens, d'autres de la période de temps allouée afin de permettre au public d'évaluer les détails techniques complets des projets, tandis que d'autres n'étaient pas d'accord avec la portée du mandat de la commission. Comme tout autre processus législatif, l'évaluation environnementale essaie de répondre aux intérêts variés de tous les participants tout en réalisant ses objectifs. Nous sommes confortables avec l'équilibre établi par les processus des gouvernements du Canada et de la Saskatchewan et il ressort, en réponse aux critiques entendues, qu'il y aurait lieu d'examiner soigneusement les options offertes advenant la modification du processus.

Les projets sur lesquels nous nous sommes penchés étaient extrêmement techniques. Les deux gouvernements ont donc fourni de l'aide financière aux intervenants afin d'aider les membres du public à effectuer leurs examens des études d'impact environnemental. Nous reconnaissons les efforts accomplis et nous soulignons particulièrement la valeur des contributions du public visant à nous aider à formuler nos recommandations. La nature publique du processus d'évaluation environnementale est sa caractéristique la plus importante. Par-dessus tout, il faut la favoriser et la protéger.

Au cours des six années de l'examen, il a été mentionné à l'occasion que la commission n'était peut-être pas entièrement à l'abri d'une certaine interférence politique. [Voir, par exemple, M. Penna, Transcript of Supplementary Public Hearings for Midwest and Cigar Lake, La Ronge, Saskatchewan, le 27 août 1997, p. 149.] Certains participants ont allégué que des représentants des gouvernements fédéral et provincial pourraient avoir exercé des pressions auprès de la commission afin d'obtenir les recommandations qu'ils voulaient. Rien ne pourrait s'écarter davantage de la vérité. Les représentants des deux niveaux de gouvernement ont scrupuleusement évité de se mêler d'aucune façon des travaux de la commission. En fait, seuls les Évêques de la Saskatchewan ont essayé de corrompre le processus en utilisant leur influence pour faire de l'interférence politique dans les examens des évaluations environnementales. [Star Phoenix, Uranium hearings not working, bishops say, le 27 novembre 1996, p. 3.]

Le processus d'examen public de ces projets s'est déroulé indépendamment du gouvernement et de l'industrie. Toutes les activités d'examen ont été exécutées de la façon la plus transparente possible et le public était en mesure de consulter tous les documents. Nous avons essayé de tenir toutes les audiences de façon non judiciaire en permettant aux représentants du public, de l'industrie et du gouvernement de se faire entendre entièrement. Nos audiences ont été parmi les plus complètes jamais entreprises au Canada. Comme l'indiquent leurs réponses aux recommandations de la commission, le gouvernement du Canada et celui de la Saskatchewan ont examiné soigneusement nos rapports avant de prendre les décisions relatives aux projets visés. Nous sommes satisfaits de leurs réactions à l'égard de ce que nous avons accompli.

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7.0 Conclusions

7.1 Formation

Depuis cinq ans, le plan de formation multilatéral et les programmes connexes ont permis à un nombre croissant de gens du Nord de trouver un emploi dans divers secteurs, en particulier dans l'industrie minière. Il faut encourager ces initiatives de formation, et nous recommandons que soit renouvelé le plan de formation multilatéral ou un autre programme amélioré de formation à l'emploi. Il est important également de valoriser le système scolaire de la maternelle à la douzième année, ainsi que le système collégial, afin que les habitants du nord de la Saskatchewan puissent tirer profit des débouchés offerts par l'exploitation des gisements d'uranium et par les autres secteurs industriels.

7.2 Possibilités d'emploi et occasions d'affaires

Par le passé, les baux relatifs aux droits de surface s'accompagnaient d'accords sur les ressources humaines selon lesquels les entreprises minières étaient encouragées à embaucher les habitants du nord de la Saskatchewan et à faire appel aux fournisseurs locaux de produits et de services. Cette démarche a donné de bons résultats, faisant augmenter graduellement l'emploi dans le Nord et incitant les gens de la région à fonder des commerces de toutes sortes. La province devrait continuer de rattacher des exigences semblables aux accords concernant les baux relatifs aux droits de surface. L'objectif global du secteur devrait être de faire monter la participation des travailleurs du Nord à au moins 67 p. 100 de la main-d'oeuvre totale de l'industrie dans la région, et de maintenir la participation des commerçants du Nord à 35 p. 100 ou plus des achats effectués par les exploitants d'uranium. La province ne devrait pas permettre l'épuisement de ses ressources naturelles sans obtenir, en compensation, des avantages propres à aider sa population du Nord à prendre pleinement part à l'avenir du Canada.

7.3 Vitalité des collectivités

Il faudra protéger la vitalité des collectivités du Nord pendant la mise en oeuvre des projets de mines d'uranium dans les environs. Pour contrer la possibilité d'effets nuisibles persistants sur ces collectivités, il convient d'embaucher des spécialistes qualifiés que l'on chargera de définir un ensemble d'indicateurs pouvant servir efficacement au contrôle et à l'étude des impacts de l'exploitation des gisements d'uranium sur la qualité de vie dans le nord de la Saskatchewan. Cameco Corporation a généreusement offert de consacrer 250 000 dollars par an au financement d'une étude de ce genre et à la création d'une base de données relatives aux effets de l'exploitation minière sur la santé et l'état socio-économique des communautés du Nord. Nous recommandons que les gouvernements fédéral et provincial travaillent de concert avec Cameco Corporation pour veiller à ce que ce programme soit mis en oeuvre promptement et reçoive les fonds nécessaires pour fonctionner avec efficacité.

7.4 Recherche

L'exploitation des mines d'uranium se poursuivra dans le nord de la Saskatchewan pendant bien des décennies encore. La recherche appliquée axée sur la découverte de moyens plus efficaces et plus écologiques de traiter le minerai et de stocker les résidus devrait probablement se révéler un bon investissement. La commission recommande que des travaux de ce type soient exécutés par la province, en collaboration avec la Commission de contrôle de l'énergie atomique et l'industrie minière, dans les laboratoires du Conseil de recherches de la Saskatchewan ou de l'une des universités de la province. La division du pétrole du Conseil de recherches de la Saskatchewan pourrait servir de modèle en vue d'un programme de recherche appliquée axée sur le secteur.

7.5 Usines de concentration du minerai

Il faudrait encourager la pratique de traiter dans une même usine le minerai provenant de plusieurs mines. On causera ainsi, au total, moins de dommages à l'environnement qu'en situant les activités de broyage et le stockage des résidus dans diverses installations près des mines. Il sera également plus aisé de procéder à la surveillance à long terme si le nombre d'emplacements à contrôler est moindre.

7.6 Installations de stockage des résidus et de dépôt des déchets rocheux

Les résidus sont la principale source à long terme de contaminants environnementaux pouvant éventuellement émaner de ces projets. La construction d'installations sûres pour la gestion des résidus est donc de première nécessité. Nous recommandons le recours aux dépôts en surface dans des puits de mines épuisées. S'il y a stockage des résidus sous l'eau, il faudra sélectionner l'emplacement avec le plus grand soin. Normalement, il est préférable de choisir l'emplacement une fois que la mine est complètement épuisée et après avoir étudié à fond les caractéristiques géologiques et hydrogéologiques des formations environnantes.

7.7 Déchets rocheux

Il faut éviter de déposer en surface les déchets rocheux susceptibles de produire des acides. Pour faire en sorte qu'il n'y ait aucun dépôt en surface, nous recommandons d'entreprendre des recherches afin de trouver de meilleures méthodes pouvant servir à séparer les déchets rocheux inertes de ceux qui peuvent éventuellement produire des acides.

Nous n'approuvons pas l'utilisation des lacs comme dépôts de déchets si d'autres lieux s'y prêtent. De fait, la meilleure façon de se débarrasser des déchets rocheux serait de les remettre sous terre ou de les déposer dans des puits de mines épuisées. Dans ce cas, il convient de remplir le puits complètement et de couvrir les déchets d'une couche de plusieurs mètres de déchets inertes ou de moraine de fond pour empêcher la formation d'un étang qui pourrait éventuellement être pollué par la diffusion ascendante de contaminants provenant des déchets stockés en dessous.

7.8 Surveillance à long terme

Chacune des installations construites pour le stockage des résidus d'uranium contiendra des millions de tonnes de déchets à la fois toxiques et radioactifs. Étant donné que personne n'a encore l'expérience de l'entretien nécessaire à ces installations pendant tout le temps qu'il faudra avant que les déchets stockés dans ces puits deviennent inoffensifs, il sera impossible, dans l'avenir prévisible, de laisser ces endroits sans surveillance aucune. Il se peut fort bien que les installations de stockage des résidus fonctionnent exactement comme prévu et ne nécessitent que très peu de mesures d'atténuation, mais il serait téméraire de dresser des plans à partir d'une telle hypothèse. Si l'on se fie à l'expérience acquise relativement aux systèmes de stockage des résidus, il serait plus prudent de contrôler de façon continue et d'être prêt à faire face à toute éventualité qui pourrait advenir. Si le fonctionnement de l'installation se révèle satisfaisant, on pourra diminuer la fréquence des contrôles, mais la nécessité de procéder à des vérifications périodiques ne disparaîtra jamais complètement. Voilà pourquoi nous recommandons la désignation d'une autorité qui pourrait surveiller tous les emplacements de façon permanente et prendre les mesures d'atténuation qui s'imposent, s'il y a lieu.

7.9 Contrôle des effets cumulatifs

La propagation possible des contaminants est évaluée à l'échelle régionale par le Groupe de travail sur le contrôle des effets cumulatifs (GTCEC), créé en 1994 par la Saskatchewan Environment and Resource Management et par la Commission de contrôle de l'énergie atomique. Les comités de la qualité de l'environnement appuient cette initiative à cause des liens étroits que les gens du Nord entretiennent avec leur territoire. Il est important que l'on continue d'accorder les fonds nécessaires au travail de ce groupe et que les habitants de la région participent de plus près aux activités du Groupe de travail sur le contrôle des effets cumulatifs.

7.10 Comités de la qualité de l'environnement

La formation des comités de la qualité de l'environnement est l'une des retombées les plus marquantes des examens environnementaux. La meilleure façon de protéger l'environnement du Nord est de faire mieux connaître l'industrie des mines d'uranium à la population et de permettre aux gens de participer au développement futur de ce secteur. Nous recommandons fortement aux gouvernements fédéral et provincial, ainsi qu'aux entreprises minières, de continuer à soutenir ces comités.

7.11 Routes

Presque toutes les activités de développement du Nord alourdissent le fardeau imposé au réseau routier existant. Il faut que soit entreprise une étude complète des surcharges cumulatives que devront subir les routes du Nord au cours des dix prochaines années et après. La province pourrait se charger d'une recherche de ce genre et se préparer, en collaboration avec les utilisateurs du réseau, à construire toutes les routes nécessaires et à les entretenir selon des normes acceptables. Une infrastructure modernisée de transports pourrait bien être un des héritages les plus importants que le secteur de l'exploitation des mines d'uranium, une fois ses projets accomplis, laissera à la région du nord de la Saskatchewan.

7.12 Santé et sécurité des travailleurs

Les mineurs, surtout ceux qui travaillent sous terre, dépendent des organes de réglementation pour qu'on leur assure des conditions de travail sécuritaires. Il est donc essentiel que les lois et les règlements prévoient une protection suffisante pour tous les travailleurs, contractuels et autres; que les mines soient inspectées fréquemment; et que toutes les précautions soient prises pour veiller à l'observation de pratiques de travail axées sur la sécurité.

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8.0 Orientations pour l'avenir

Pendant les six années de la période d'examen, la commission a vu se produire certains changements assez extraordinaires. Le nombre d'employés originaires du Nord a augmenté et on a mis sur pied des plans précis de formation préparatoire à l'emploi afin de répondre au désir de nombreux travailleurs du Nord de trouver un emploi stable. D'autres entreprises ont maintenant accès à un nombre grandissant et de plus en plus varié de débouchés. Nous avons assisté à la création des comités de la qualité de l'environnement et du Groupe de travail de l'Athabasca, qui offrent à la population du Nord les moyens d'influer plus sérieusement sur les activités de l'industrie de l'exploitation des mines d'uranium et sur les ministères responsables de la réglementation qui touche ce secteur. Les effets cumulatifs de l'exploitation des mines d'uranium ont fait l'objet d'une étude menée par le Groupe de travail sur le contrôle des effets cumulatifs. Il est devenu obligatoire, avant la construction de toute installation minière, de réserver des fonds en vue de sa désaffectation. Des efforts sont consentis en vue de créer, à l'intention des collectivités du Nord, une base de données sur les impacts socio-économiques et les effets sur la santé. Le gouvernement fédéral, le gouvernement provincial et les dirigeants du Nord débattent de la question du partage des recettes provenant des ressources. Ce sont là des manifestations remarquables des progrès accomplis.

La commission a dû se mesurer à des enjeux des plus passionnants, à savoir y a-t-il lieu d'accroître l'exploitation des gisements d'uranium dans le nord de la Saskatchewan et, dans l'affirmative, à quelles conditions ces développements devraient-ils être permis? Nous avons écouté des opinions diverses exposées par un grand nombre de citoyens et nous avons tenu compte de ces opinions au moment d'élaborer les recommandations contenues dans nos rapports, qui serviront à orienter l'action des gouvernements fédéral et provincial. Nous sommes convaincus que les deux paliers de gouvernement ont écouté nos conseils attentivement et, en général, qu'ils y ont réagi positivement.

Par ailleurs, nous craignons que l'amorce de changements et de nouvelles initiatives ne risque de rester en plan une fois le processus d'examen achevé, lorsque le public n'aura plus toutes ces occasions de contester et de remettre en question les activités des exploitants. Nous admettons qu'il est difficile de prévoir les événements et les priorités à venir. Ce qui apparaît raisonnable aujourd'hui pourrait le sembler beaucoup moins dans quelques années.

C'est pourquoi nous recommandons la tenue d'une étude rétrospective, dans une dizaine d'années, afin d'étudier l'efficacité réelle à long terme du processus d'examen. Une étude de ce genre aiderait les agences provinciale et fédérale régissant les examens, c'est-à-dire l'Agence canadienne d'évaluation environnementale et la Saskatchewan Environment and Resources Management, à mesurer les avantages du processus d'évaluation environnementale. Il faudra répondre à plusieurs questions : À long terme, les examens environnementaux ont-ils pesé de quelque façon dans la balance? Dans quelle mesure précise les valeurs prédites pendant l'examen correspondent-elles aux valeurs observées (en ce qui concerne les recettes encaissées par les gouvernements, les niveaux d'emploi de la population du Nord, les occasions d'affaires pour les commerçants du Nord, les émissions de contaminants provenant de chaque emplacement et l'impact de l'exploitation minière sur le biote, c'est-à-dire autant les effets sur place que les effets cumulatifs sur toute la région)? Combien de recommandations de la commission ont-elles été acceptées par les gouvernements fédéral et provincial, et jusqu'à quel point ont-elles été fidèlement mises en oeuvre? À quel état seront-elles alors rendues les nombreuses initiatives lancées dans la foulée des examens publics (comités de la qualité de l'environnement, Groupe de travail de l'Athabasca, tentatives visant à mesurer et à contrôler la santé et la vitalité des collectivités du Nord, étude épidémiologique sur la fréquence du cancer du poumon et sur le taux de mortalité des travailleurs des mines d'uranium)?

Pour répondre à ces questions, il faudra la coopération de l'industrie et des ministères fédéraux et provinciaux. Selon nous, l'Agence canadienne d'évaluation environnementale et la Saskatchewan Environment and Resources Management seraient les organismes tout indiqués pour lancer et soutenir une telle étude rétrospective. Nous croyons que l'étude elle-même devrait être confiée à une entité indépendante, engagée par contrat, dont la composition exclurait tout membre de la commission actuelle ou de toute autre commission antérieure. Nous recommandons également que l'étude rétrospective fasse appel, d'une façon ou d'une autre, à la participation du public.

En dernière analyse, les impacts des nombreux projets que nous avons examinés toucheront profondément les habitants de la Saskatchewan, tout particulièrement ceux du nord de la province. Tous les participants aux examens d'évaluation environnementale ont le droit de savoir si leurs efforts ont permis de garantir la mise en oeuvre de mesures d'atténuation des effets nuisibles et le renforcement des effets positifs.

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